Les sources alchimiques de Vincent de Beauvais

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SĂ©bastien MOUREAU1

Miroir de l’état des connaissances au milieu du XIIIe siĂšcle, l’Ɠuvre encyclopĂ©dique de Vincent de Beauvais ne cesse d’ĂȘtre Ă©tudiĂ©e depuis des annĂ©es par les chercheurs. Mais l’abondance d’informations et de domaines couverts par le dominicain est loin d’avoir Ă©tĂ© Ă©puisĂ©e. L’alchimie, science encore jeune au XIIIe siĂšcle, fait partie de ces champs de connaissance. Elle est introduite en Occident latin lors du mouvement des traductions arabo-latines des XIIe et XIIIe siĂšcles. On considĂšre gĂ©nĂ©ralement comme limite la premiĂšre traduction latine d’un traitĂ© arabe alchimique complet qui soit datĂ©e, la traduction du Liber de compositione alchimiae, attribuĂ© Ă  l’alchimiste lĂ©gendaire Morien, rĂ©alisĂ©e en 1144 par Robert de Chester ; cependant, cette Ă©tape est un terme symbolique, car la plupart des traductions de textes alchimiques ne sont pas datĂ©es2. Mais l’art de la transmutation passionne rapidement les Occidentaux, et Vincent de Beauvais lui accorde une place considĂ©rable dans son Ɠuvre, se faisant le tĂ©moin du statut de l’alchimie au XIIIe siĂšcle. Cependant, si quelques Ă©tudes ont Ă©tĂ© produites Ă  ce sujet3, elles n’ont rien de systĂ©matique. En examinant toutes les citations relatives Ă  ce domaine dans le Speculum maius, je tends Ă  combler cette lacune en clarifiant les opinions Ă©mises pour apporter de nouveaux Ă©lĂ©ments de rĂ©flexion. Cette Ă©tude se focalise ainsi sur l’identification et l’analyse des sources alchimiques du Speculum maius de Vincent de Beauvais ; elle porte principalement sur la version trifaria (terminĂ©e vers 1259), dans laquelle l’alchimie est abordĂ©e abondamment, mais s’attarde Ă©galement quelque peu sur la version bifaria (antĂ©rieure Ă  1244) ; le but n’est pas de dĂ©finir une doctrine des mĂ©taux chez Vincent de Beauvais, exercice quelque peu artificiel et souvent pĂ©rilleux, ni de cerner l’opinion de Vincent de Beauvais sur l’alchimie, ce qui a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© fait4. Mon intention est aussi de proposer aux chercheurs un outil prĂ©cieux en annexe : la comparaison intĂ©grale des extraits relatifs Ă  l’alchimie du Speculum naturale (= SN), du Speculum doctrinale (= SD) et de leurs sources identifiĂ©es5. Ces outils ont Ă©tĂ© construits grĂące au corpus Sourcencyme (Sources des encyclopĂ©dies mĂ©diĂ©vales) mis en Ɠuvre par Isabelle Draelants Ă  l’Atelier Vincent de Beauvais du Centre de MĂ©diĂ©vistique Jean-Schneider (ERL 7229) de l’UniversitĂ© de Lorraine6, et permettent des Ă©tudes analytiques de l’utilisation des sources alchimiques dans le Speculum maius.

AprĂšs un rapide Ă©tat de la question, les mĂ©thodes de dĂ©limitation du corpus et d’identification des sources sont prĂ©sentĂ©es. Ensuite vient l’examen systĂ©matique de chaque autoritĂ© citĂ©e et l’utilisation qu’en font Vincent de Beauvais et ses frĂšres7 ; ces autoritĂ©s sont classĂ©es selon le type de collecte puis selon l’ordre de longueur des citations, en ordre de frĂ©quence dĂ©croissante, Ă  partir de l’autoritĂ© la plus citĂ©e (Ă  l’exception de l’Actor, placĂ© Ă  la fin de l’article).

Introduction

État de la question

La premiĂšre Ă©tude de l’alchimie chez Vincent de Beauvais est celle de Marcellin Berthelot8. Dans son ouvrage sur l’histoire de la chimie au Moyen Âge, le cĂ©lĂšbre chimiste consacre quelques pages au Speculum maius, dans lesquelles il s’intĂ©resse avant tout Ă  l’opinion de Vincent de Beauvais lui-mĂȘme ainsi qu’au contenu des citations. Il y prĂ©sente un bon rĂ©sumĂ© des passages du Speculum naturale sur l’alchimie. Mais l’essai de dĂ©gager une doctrine propre Ă  Vincent de Beauvais tourne vite court ; Berthelot constate en effet que, si les textes citĂ©s par Vincent de Beauvais prĂŽnent le plus souvent les mĂȘmes idĂ©es, ils diffĂšrent cependant en ce qui concerne les dĂ©tails, ce qui rend incohĂ©rent le tout. On observe quelques gĂ©nĂ©ralisations, ainsi que quelques erreurs historiques : Berthelot voit en Vincent de Beauvais le tĂ©moin de la connaissance des alchimistes de son temps, et prĂŽne l’utilisation du Speculum maius pour dater le contenu des traitĂ©s alchimiques, alors que Vincent de Beauvais n’utilise qu’un certain nombre de traitĂ©s, et tĂ©moigne uniquement de la connaissance de l’alchimie par les non-alchimistes de son Ă©poque.

En 1944, Pauline Aiken s’intĂ©resse secondairement Ă  l’alchimie chez Vincent de Beauvais dans son article Vincent of Beauvais and Chaucer’s Knowledge of Alchemy9. Cet article consacrĂ© principalement Ă  Chaucer prĂ©sente quelques imperfections dans la mesure oĂč Aiken tente de dĂ©finir la doctrine alchimique de Vincent comme si c’était une composition propre, sans tenir compte du caractĂšre encyclopĂ©dique du Speculum maius, et trahit un manque de connaissance des textes alchimiques (par exemple, le De anima attribuĂ© Ă  Avicenne qui est citĂ© par Vincent de Beauvais n’est en rien le De anima authentique d’Avicenne).

En 1976, Chiara Crisciani prĂ©sente une brĂšve Ă©tude sur les liens entre l’alchimie et les dominicains au XIIIe siĂšcle10. Elle tire d’intĂ©ressantes conclusions sur la façon dont Vincent de Beauvais considĂšre l’alchimie comme un art mĂ©canique.

Dans le mĂȘme ordre d’idĂ©es, Jean-Marc Mandosio publie en 1993 un article consacrĂ© Ă  l’alchimie dans la classification des sciences et des arts Ă  la Renaissance11. Il propose au dĂ©but de son article une brĂšve Ă©tude de la place de l’alchimie dans les classifications du XIIIe siĂšcle, et y souligne les opinions de Vincent de Beauvais. Ce dernier se fonde sur les classifications d’Hugues de Saint-Victor et de Richard de Saint-Victor, et considĂšre l’alchimie comme un art mĂ©canique, c’est-Ă -dire relevant des arts « qui, d’aprĂšs les dĂ©finitions courantes de la science, ne s’efforcent pas de comprendre en le thĂ©orisant le ‘pourquoi’ des choses »12. Ainsi, Vincent de Beauvais tient l’alchimie pour un art qui se limite Ă  de simples opĂ©rations manuelles, une pratique sans thĂ©orie, une technique qui manipule des forces sans chercher Ă  les comprendre. Il en fait un art subordonnĂ© Ă  d’autres (mĂ©decine, mĂ©tallurgie). Il ne nie cependant pas la possibilitĂ© de l’existence d’une thĂ©orie des arts mĂ©caniques, mais elle est d’une certaine maniĂšre extĂ©rieure Ă  eux, les artisans ne la possĂšdent pas13.

En 1991, William Newman se penche briĂšvement sur la place de Vincent de Beauvais dans l’« Alchemical debate » du XIIIe siĂšcle concernant la possibilitĂ© de la transmutation des espĂšces14.

C’est en 1998 que paraĂźt un article plus spĂ©cifiquement consacrĂ© Ă  l’alchimie chez Vincent de Beauvais et d’autres encyclopĂ©distes du XIIIe siĂšcle, publiĂ© par Marie Claude DĂ©prez-Masson15. Il constitue une bonne contribution Ă  la question ; son intĂ©rĂȘt principal rĂ©side dans les rĂ©sumĂ©s fiables de la structure des passages du Speculum maius sur l’alchimie (p. 133-135), et une esquisse de l’évolution entre la version bifaria du Speculum maius et la version trifaria (p. 136-142). En revanche, l’identification est laissĂ©e de cĂŽtĂ©, et l’étude comporte plusieurs erreurs : DĂ©prez-Masson considĂšre comme primaires des sources internes, par exemple l’Armenides qui est en rĂ©alitĂ© une citation du De aluminibus et salibus qui contient elle-mĂȘme une phrase attribuĂ©e Ă  Armenides. En consĂ©quence, les conclusions se rĂ©vĂšlent douteuses voire erronĂ©es, mais peuvent ĂȘtre complĂ©tĂ©es par les articles de Chiara Crisciani et Jean-Marc Mandosio.

Dans son ouvrage Scolastique et Alchimie publiĂ© en 200916, Sylvain Matton offre aux pages 739-764 le texte des chapitres 105-133 du livre XI du Speculum doctrinale. Il utilise l’édition de 1591 de Venise, et propose en apparat les leçons des extraits correspondants du Speculum naturale.

RĂ©cemment, Jean-Marc Mandosio publie un article sur l’acier dans lequel il analyse plusieurs passages du Speculum maius de Vincent de Beauvais17 et les met en contraste avec les descriptions de l’acier dans le Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© et le De anima alchimique du Pseudo-Avicenne, entre autres textes.

Le dossier sur l’alchimie chez Vincent de Beauvais prĂ©sentĂ© ici n’est pas la premiĂšre Ă©tude exhaustive d’un domaine du savoir dans l’encyclopĂ©die du dominicain : la logique a fait l’objet de la thĂšse de Serge Lusignan, la mĂ©decine a Ă©tĂ© analysĂ©e par Stefan Schuler, et le droit par Mario Cardinale18, mais aucun n’a offert une identification complĂšte des sources employĂ©es par Vincent de Beauvais.

L’alchimie chez Vincent de Beauvais

Sur les citations consacrĂ©es Ă  l’alchimie dans la version bifaria du Speculum maius, nous connaissons peu de choses. On trouve quelques passages sur la minĂ©ralogie au livre V, qui concerne l’Ɠuvre du troisiĂšme jour de la crĂ©ation (Quintus agit de inicio operis tercie diei id est de dispositione partium inferiorum huius mundi et habet (CXXXIII) capitula)19. On sait Ă©galement que le livre XXV, perdu Ă  ce jour, Ă©tait consacrĂ© aux arts mĂ©caniques (De mechanica et eius speciebus) ; il contenait peut-ĂȘtre des donnĂ©es sur l’alchimie (les manuscrits de la bifaria conservĂ©s ne couvrent que les livres I Ă  VIII).

Dans la version trifaria du Speculum maius, l’alchimie est principalement abordĂ©e dans deux parties. Dans le Speculum naturale, au livre VII, consacrĂ© Ă  l’Ɠuvre du troisiĂšme jour de la crĂ©ation, c’est-Ă -dire Ă  la minĂ©ralogie, aux corpora mineralia20, Vincent de Beauvais Ă©largit la matiĂšre du livre V de la bifaria, qu’il dĂ©veloppe par ailleurs en quatre livres distincts dans la trifaria. On lit dans la citation de l’Actor au dĂ©but du chapitre 1 du livre VII :

« AprĂšs avoir parlĂ© de la nature de la terre, de sa fertilitĂ© et de sa culture, ainsi que des phĂ©nomĂšnes qui l’affectent et des vapeurs, il reste Ă  parler des corps terrestres qui apparaissent en partie dans les entrailles de la terre, en partie Ă  sa surface, c’est-Ă -dire les minĂ©raux, les couleurs naturelles et les pierres. Nous les avons en effet retranchĂ©s du livre prĂ©cĂ©dent, pour Ă©viter une dĂ©sagrĂ©able prolixitĂ©, et les avons rĂ©servĂ©es pour les (prĂ©senter) de maniĂšre plus dĂ©taillĂ©e dans les (livres) suivants. Ainsi, nous allons maintenant commencer par les corps minĂ©raux. »21

Dans le Speculum doctrinale, Vincent de Beauvais s’intĂ©resse spĂ©cifiquement Ă  l’alchimie au livre XI, consacrĂ© aux arts mĂ©caniques22, aux chapitres 105 Ă  133. On trouve en outre quelques passages dissĂ©minĂ©s dans les autres livres : Ă  la fin des livres V et VI du Speculum naturale, dans les descriptions du sel, de l’alun, du verre, et des corps terrestres, et au livre XV du Speculum doctrinale, dont les chapitres 57 Ă  65 portent sur les mineralia23.

Le livre VII du Speculum naturale s’articule de la sorte. Vincent de Beauvais commence par prĂ©senter des principes thĂ©oriques sur les mĂ©taux et leur origine (thĂ©orie du soufre et du mercure) ; puis il discute rapidement les applications concrĂštes des opĂ©rations alchimiques ; il donne ensuite une longue description des diffĂ©rentes matiĂšres (surtout les mĂ©taux, ainsi que les esprits et d’autres substances) selon un schĂ©ma rĂ©gulier (dĂ©finition et nature ; travail en alchimie ; usages mĂ©dicaux). L’ordre des mĂ©taux citĂ©s est le suivant : or, argent, cuivre, (laiton), Ă©tain, plomb et fer, parmi lesquels sont insĂ©rĂ©es des descriptions de divers produits dĂ©rivĂ©s de ces mĂ©taux (sels, etc.). Du chapitre 81 au chapitre 97, il se penche sur des sujets plus directement alchimiques : l’élixir, la transmutation, les instruments des alchimistes, et diffĂ©rentes opĂ©rations. Aux chapitres 84 Ă  86, il fait Ă©cho au riche dĂ©bat du XIIIe siĂšcle sur la possibilitĂ© de la transmutation24. Les chapitres 98 Ă  104 reprennent des descriptions de diverses substances.

La structure des chapitres 105 Ă  133 du livre XI du Speculum doctrinale est assez proche de celle du livre VII du Speculum naturale, Ă  l’exception de quelques points : tout d’abord, le nombre de citations est bien moindre dans le Speculum doctrinale, et Vincent de Beauvais commence par la question de la possibilitĂ© de la transmutation. Les opĂ©rations sur les substances sont insĂ©rĂ©es dans les chapitres contenant les descriptions des substances. L’ordre des mĂ©taux citĂ©s est lĂ©gĂšrement diffĂ©rent : or, argent, cuivre, fer, Ă©tain et plomb. Le Speculum doctrinale propose un condensĂ© synthĂ©tique du contenu du livre VII du Speculum naturale, plus directement axĂ© sur l’alchimie, mais dont de nombreuses citations sur la mĂ©tallurgie sont absentes.

DĂ©limitation du corpus de citations25

Une des difficultĂ©s de ce travail a consistĂ© Ă  dĂ©limiter le corpus de citations. Se limiter aux citations purement alchimiques, c’est-Ă -dire aux citations ne traitant que stricto sensu de la transmutation ou de la teinture des mĂ©taux, n’était pas envisageable, car trop restreint pour apporter des rĂ©sultats significatifs. J’ai donc Ă©largi la collecte Ă  la mĂ©tallurgie, ou encore Ă  la minĂ©ralogie, Ă  l’exclusion des pierres (qui font l’objet du livre VIII et prĂ©sentent des sources diffĂ©rentes)26 et les processus plus gĂ©nĂ©raux (qui sont repris dans de trop nombreux endroits du Speculum maius). Le noyau a donc d’abord Ă©tĂ© collectĂ© Ă  partir du livre VII du Speculum naturale et des chapitres 105 Ă  133 du livre XI du Speculum doctrinale, puis Ă©tendu Ă  quelques passages de la fin des livres V et VI du Speculum naturale et Ă  quelques extraits du livre XV du Speculum doctrinale. Certaines citations ont Ă©tĂ© exclues : les sources qui n’ont pas de lien Ă©vident avec l’alchimie, qui ne sont pas des textes alchimiques ou qui ne sont pas liĂ©es assez directement Ă  l’alchimie et la minĂ©ralogie. Ainsi, je n’analyse pas les citations de Pline et d’Isidore, ni les autoritĂ©s mĂ©dicales comme Hali (‘AlÄ« ibn al-‘Abbās al-MajĆ«sÄ«), mĂȘme lorsqu’elles portent sur les qualitĂ©s thĂ©rapeutiques des substances Ă©galement utilisĂ©es dans l’alchimie (mercure, etc.). Toutefois, j’ai pris en considĂ©ration les citations du Liber de natura rerum, du Philosophus, des Meteora, ainsi que du De vaporibus attribuĂ© Ă  AverroĂšs, car elles sont aussi employĂ©es comme des textes alchimiques dans le Speculum naturale, c’est-Ă -dire dans des chapitres spĂ©cialement consacrĂ©s Ă  l’alchimie par Vincent de Beauvais.

Ainsi, deux groupes de citations se dĂ©gagent : les traitĂ©s spĂ©cifiquement alchimiques, dont je collecte les citations de maniĂšre exhaustive dans le Speculum maius, que Vincent de Beauvais utilise pour dĂ©crire l’alchimie, et des traitĂ©s plus gĂ©nĂ©raux, dont je collecte les citations de maniĂšre exhaustive dans le Speculum maius, auxquels Vincent de Beauvais a recours dans diffĂ©rents domaines.

De la sorte, j’ai dĂ©limitĂ© un corpus de 178 citations27, 110 dans le Speculum naturale et 68 dans le Speculum doctrinale, divisĂ©es selon dix « marqueurs »28. Vincent de Beauvais cite ainsi : le De anima alchimique du pseudo-Avicenne, un Alchimista et une Doctrina alchimiae (non identifiĂ©s), le De aluminibus et salibus, l’Epistola ad Hasen regem de re tecta attribuĂ©e Ă  Avicenne, les Meteora (c’est-Ă -dire les MĂ©tĂ©orologiques d’Aristote, livre III et IV, et le De mineralibus d’Avicenne), un De vaporibus qu’il attribue Ă  AverroĂšs (en rĂ©alitĂ© les Quaestiones Nicolai Peripatetici), un Liber de natura rerum (Ă  savoir le Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© et le Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham), un Philosophus (non identifiĂ©, qui cite le Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© et le Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham), et l’Actor (vraisemblablement Vincent de Beauvais lui-mĂȘme).

Dans le tableau et le graphique qui suivent sont notĂ©es les statistiques quantitatives des 178 citations analysĂ©es pour cet article. La premiĂšre colonne contient le marqueur trouvĂ© dans le Speculum naturale et le Speculum doctrinale29. Les lignes qui ne sont pas en gras sont une dĂ©composition de la ligne prĂ©cĂ©dente : par exemple, la ligne du marqueur Meteora en gras est suivie de trois lignes qui ne sont pas en gras qui notent les trois parties des Meteora qui sont citĂ©es dans notre contexte (le livre III et le livre IV des MĂ©tĂ©orologiques d’Aristote, et le De mineralibus d’Avicenne). La seconde colonne dĂ©crit le type de collecte que j’ai faite : exhaustive (en bleu dans le graphique) ou non (en mauve). Les colonnes « mots SN » et « mots SD » indiquent respectivement le nombre de mots des citations dans le Speculum naturale et le Speculum doctrinale ; dans le mĂȘme ordre d’idĂ©es, les colonnes « cit. SN » et « cit. SD » notent le nombre de citations. Les pourcentages donnĂ©s (de mots et de citations) sont calculĂ©s par rapport Ă  l’ensemble du corpus de citations utilisĂ© dans cette Ă©tude. La collecte est quantitative uniquement, elle suit le nombre de mots et le nombre de citations. Le graphique est Ă©tabli selon le pourcentage du nombre de mots des extraits sous chaque marqueur par rapport au corpus total de citations. Les abrĂ©viations sont explicitĂ©es au dĂ©but de l’annexe I.

Marqueur

type

identifié

mots SN

mots SD

total mots

% nb. mots

cit. SN

cit. SD

total cit.

% nb. cit.

Alchimista / Doctrina alchimiae

exh.

non

3155

3007

6142

26,41 %

19

18

37

20,79 %

Alchimista

exh.

non

1879

2347

4226

18,17 %

12

14

26

14,61 %

Doctrina alchimiae

exh.

non

1256

660

1916

8,24 %

7

4

11

6,18 %

De anima

exh.

oui

2158

2108

4266

18,35 %

16

14

30

16,85 %

De aluminibus et salibus

exh.

oui

1682

1594

3276

14,09 %

18

14

32

17,98 %

Epistola ad Hasen regem

exh.

oui

456

406

862

3,71 %

4

3

7

3,93 %

Meteora*

non exh.

oui

1807

1407

3214

13,82 %

19

5

24

13,48 %

*Les nombres mentionnĂ©s de citations (et non de mots) en Meteora (total) sont infĂ©rieurs Ă  la somme des nombres des citations de ses trois parties en raison des citations composites, c’est-Ă -dire des citations qui contiennent Ă  la fois des passages du livre IV des MĂ©tĂ©orologiques d’Aristote et du De mineralibus d’Avicenne.

De mineralibus

non exh.

oui

1556

1407

2963

12,74 %

14

5

19

10,67 %

Livre IV des MĂ©t.

non exh.

oui

199

0

199

0,86 %

5

0

5

2,81 %

Livre III des MĂ©t.

non exh.

oui

52

0

52

0,22 %

2

0

2

1,12 %

Liber de natura/is rerum**

non exh.

oui

1793

464

2257

9,71 %

15

6

21

11,80 %

**Les nombres mentionnĂ©s de citations (et non de mots) en Liber de natura/is rerum sont infĂ©rieurs Ă  la somme des nombres des citations de ses deux sources en raison d’une citation composite, c’est-Ă -dire d’une citation qui contient Ă  la fois des passages du Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© et du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham.

Liber de natura rerum de Thomas de Cantimpré

non exh.

oui

442

436

878

3,78 %

6

5

11

6,18 %

Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham

non exh.

oui

1351

28

1379

5,93 %

10

1

11

6,18 %

De vaporibus (QNP)

non exh.

oui

2175

0

2175

9,35 %

10

0

10

5,62 %

Actor

non exh.

oui

273

329

602

2,59 %

5

7

12

6,74 %

Philosophus***

non exh.

non

399

183

582

2,50 %

5

2

7

3,93 %

***Les nombres mentionnĂ©s de citations et de mots en Philosophus sont infĂ©rieurs Ă  la somme des nombres des citations de ses deux sources identifiĂ©es en raison d’une citation non identifiĂ©e.

Liber de natura rerum de Thomas de Cantimpré

non exh.

oui

120

183

303

1,30 %

2

2

4

2,25 %

Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham

non exh.

oui

256

0

256

1,10 %

2

0

2

1,12 %

Total

 

 

13830

9442

23252

100 %

110

68

178

100 %

 

 

Dans la suite de l’article, les sources sont ordonnĂ©es selon le type de collecte, puis selon leur longueur, de l’autoritĂ© la plus citĂ©e Ă  la moins citĂ©e (Ă  l’exception de l’Actor, placĂ© en fin d’article). L’Alchimista et la Doctrina alchimiae sont regroupĂ©es, en raison de certaines convergences expliquĂ©es plus loin.

MĂ©thode d’identification des sources

L’identification s’est dĂ©roulĂ©e en deux temps. Une premiĂšre phase, que l’on pourrait qualifier de traditionnelle, a consistĂ© Ă  identifier Ă  partir du marqueur les traitĂ©s susceptibles d’ĂȘtre des sources, Ă  lire les ouvrages en question et Ă  reconnaĂźtre les passages citĂ©s. Cette mĂ©thode, chronophage, prĂ©sente des inconvĂ©nients : des passages Ă©chappent Ă  l’attention du chercheur. En outre, les textes dont le marqueur est Ă©loignĂ© du titre authentique, ou dont le titre varie de façon importante, comme c’est frĂ©quemment le cas pour les traitĂ©s mĂ©diĂ©vaux alchimiques, restent souvent impossibles Ă  identifier. L’exemple du De vaporibus attribuĂ© Ă  AverroĂšs le montre : ce texte, mieux connu sous le titre Quaestiones Nicolai Peripatetici, varie dans son titre et son attribution selon les manuscrits. Sans la vigilance de StanisƂaw Wielgus, l’éditeur des Quaestiones Nicolai Peripatetici, et le concours de la chance, les extraits du De vaporibus resteraient probablement non identifiĂ©s.

Les outils informatiques modernes peuvent ici apporter une certaine aide Ă  l’identification textuelle de citations. J’ai ainsi utilisĂ© le programme informatique Ă©laborĂ© par Ilse De Vos et Jan Keymeulen30 dans le cadre d’une thĂšse de doctorat : faisant appel Ă  un algorithme Ă©tabli pour les identifications automatiques de plagiat dans les travaux universitaires selon la distance Levenshtein-Damerau, ils ont dĂ©veloppĂ© un programme permettant d’identifier des proximitĂ©s textuelles entre deux Ă©crits. Une fois choisi le texte ou le corpus de textes Ă  identifier, on propose un texte ou un corpus de textes que l’on sait ou que l’on soupçonne ĂȘtre une source, on configure le programme selon le degrĂ© de transformation supposĂ© (distance Levenshtein-Damerau), et le logiciel trouve automatiquement les parallĂšles. Cette mĂ©thode est intĂ©ressante en particulier pour l’identification des sources internes : elle m’a permis de dĂ©couvrir que le Liber de natura/is rerum que cite Vincent de Beauvais contenait des citations internes du De aluminibus et salibus. Cependant, elle comporte Ă©galement un inconvĂ©nient majeur : il faut lui proposer un corpus de textes susceptibles d’ĂȘtre des sources, et ce corpus doit ĂȘtre prĂ©alablement saisi31.

 

Les sources alchimiques de Vincent de Beauvais

 

Les collectes exhaustives : les traités alchimiques

L’Alchimista et la Doctrina alchimiae

Le traité

L’examen de l’Alchimista (= Alc) et la Doctrina alchimiae (= Dalc) sont conjoints, car on trouve cinq citations et/ou segments de citations qui sont attribuĂ©s Ă  la Doctrina alchimiae dans le Speculum naturale et Ă  l’Alchimista dans le Speculum doctrinale32. En outre, on trouve une phrase d’un extrait attribuĂ© Ă  la Doctrina alchimiae uniquement prĂ©sent dans le Speculum naturale (SN, 7, 88a1) qui se retrouve dans un extrait attribuĂ© Ă  l’Alchimista dans le Speculum naturale et le Speculum doctrinale (SN, 7, 91c – SD, 11, 128c)33. Ce faisceau d’indices indique qu’il s’agit selon toute vraisemblance d’un seul et mĂȘme texte que Vincent de Beauvais nomme de deux maniĂšres distinctes, dont le titre serait Doctrina alchimiae et qui serait anonyme, d’oĂč l’utilisation du terme Alchimista par le dominicain. Il faut ajouter que l’emploi de l’expression Alchimista pourrait dĂ©signer un contemporain, que Vincent de Beauvais ne cite jamais nommĂ©ment. Ce texte n’est pas identifiĂ©.

L’Alchimista/ Doctrina alchimiae est un ouvrage plus tardif que d’autres textes citĂ©s par Vincent de Beauvais, car j’ai pu identifier diffĂ©rentes sources internes (cf. annexe pour la comparaison textuelle). Les citations marquĂ©es Alchimista comprennent les citations internes suivantes :

  1. deux citations du Canon d’Avicenne traduit en latin par GĂ©rard de CrĂ©mone34 : une citation non marquĂ©e, littĂ©rale35 : SN, 6, 79b – SD, 11, 121b2 ; et une citation marquĂ©e, ou plutĂŽt une allusion au Canon, lib. 1, fen 1, doc. 3, c. II (De complexionibus membrorum)36 : SN, 7, 95a – SD, 11, 132a ;

  2. deux citations marquĂ©es37 de l’Epistola ad Hasen regem de re tecta (= EAHR) attribuĂ©e Ă  Avicenne (cf. ci-dessous p. 20), traduction latine non datĂ©e, qui sont assez littĂ©rales : SN, 7, 91c – SD, 11, 128c ; et SN, 7, 91a – SD, 11, 128a ;

  3. deux citations non marquĂ©es de la version P du De aluminibus et salibus (= DAESP) (cf. ci-dessous p. 17), traduction non datĂ©e, qui sont Ă©galement assez littĂ©rales : SN, 7, 91c – SD, 11, 128c ; et SN, 7, 91a – SD, 11, 128a ;

  4. une citation marquĂ©e38 du livre XXXIV (Liber reprehensionis) du Liber de LXX de Geber (nom latinisĂ© de l’alchimiste lĂ©gendaire Jābir ibn កayyān39), peut-ĂȘtre traduit par GĂ©rard de CrĂ©mone40, citation assez Ă©loignĂ©e de l’original : SN, 7, 96a1 – SD, 11, 133a1 ;

  5. une citation marquĂ©e41 du Liber graduum de Constantin l’Africain († avant 1098/ 1099), citation assez Ă©loignĂ©e de l’original : SN, 7, 96a3 – SD, 11, 133a3.

  6. une citation marquée Ioannes Damascenus, qui est en réalité une référence à la traduction latine des Aphorismi de Jean Mésué (Ibn Māsawayh), réalisée à la fin du XIIe siÚcle (qui a circulé sous le nom de Jean DamascÚne)42.

Les citations marquĂ©es Doctrina alchimiae, quant Ă  elles, se limitent Ă  une citation interne non marquĂ©e de l’Epistola ad Hasen regem, qui est assez Ă©loignĂ©e de l’original : SN, 7, 88a1.

Le texte, un recueil selon toute vraisemblance, est forcĂ©ment postĂ©rieur Ă  ces sources, mais la plupart de ces traductions Ă©tant non datĂ©es, on doit se contenter de conjecturer une datation vers l’extrĂȘme fin du XIIe siĂšcle ou dans la premiĂšre moitiĂ© du XIIIe siĂšcle.

En SN, 7, 82a – SD, 11, 125a, l’Alchimista fait allusion Ă  la possibilitĂ© d’utiliser les Ɠufs, les cheveux et le sang pour la confection de l’élixir ; cet Ă©lĂ©ment de doctrine tire probablement son origine du De anima pseudo-avicennien ou de l’Epistola ad Hasen regem attribuĂ©e Ă  Avicenne (cf. ci-dessous p. 20), dont l’influence dans le domaine du choix de la pierre (substance Ă  partir de laquelle on fait l’élixir) est dominante jusqu’à la fin du XIIIe siĂšcle (et l’arrivĂ©e de la Summa perfectionis du pseudo-Geber) : ces trois substances organiques sont en effet la base de leur Ă©lixir.

On observe en SN, 7, 88a2 – SD, 11, 107b une citation de la Doctrina alchimiae contenant deux italianismes (melangoli et arangii, qui dĂ©signent tous deux l’orange) ainsi qu’une rĂ©fĂ©rence Ă  l’archevĂȘchĂ© de GĂȘnes, mais le caractĂšre composite du texte ne permet pas de former une conjecture prĂ©cise Ă  partir de ces Ă©lĂ©ments ; il pourrait s’agir d’un texte citĂ© dans la Doctrina alchimiae.

L’utilisation par Vincent de Beauvais

L’Alchimista et la Doctrina alchimiae n’apparaissent pas dans les livres de la version bifaria qui sont conservĂ©s.

L’Alchimista est citĂ© 26 fois (12 dans le SN, 14 dans le SD). La Doctrina alchimiae est citĂ©e 11 fois (7 dans le SN, 4 dans le SD), sous les marqueurs suivants : Alchimista (ou Alchymista), Ex verbis alchimiste ; Ex doctrina alchimie (ou alchymie). Les citations de l’Alchimista et de la Doctrina alchimiae se trouvent dans les livres 5, 6 et 7 pour le Speculum naturale (une citation pour le livre V et une pour le livre VI), et toujours dans le livre XI du Speculum doctrinale. La plupart des citations se retrouvent Ă  la fois dans le Speculum naturale et le Speculum doctrinale, Ă  l’exception de SD, 11, 121b, qui n’est repris que partiellement dans SN, 6, 79b et SN, 7, 88a, partiellement dans SD, 11, 107b.

Comme il a Ă©tĂ© dit, l’attribution est parfois diffĂ©rente entre le Speculum naturale et le Speculum doctrinale. Les chapitres dans lesquels on trouve ces citations sont surtout les chapitres purement alchimiques, tels que ceux sur l’élixir ou la transmutation, ainsi que sur diverses opĂ©rations. Elles sont cependant aussi utilisĂ©es, mais trĂšs rarement, pour les descriptions de substances, notamment celles de l’alun et du laiton. La Doctrina alchimiae est la seule source citĂ©e pour dĂ©crire les instruments des alchimistes (SN, 7, 88a2 – SD, 11, 107b).

Dans la citation SN, 7, 91a – SD, 11, 128a, on trouve une citation interne de l’Epistola ad Hasen regem (attribuĂ©e Ă  Avicenna), ce qui a causĂ© une erreur de marqueur dans le Speculum doctrinale : l’extrait y est prĂ©sentĂ© comme une citation d’Avicenne, mais le Speculum naturale nous permet de voir qu’il s’agit bien d’une citation de l’Alchimista qui contient une citation interne de l’Epistola ad Hasen regem. En outre, le marqueur est « Dicit autem princeps aboali, scilicet Avicenna » : les marqueurs de Vincent de Beauvais ne sont pas structurĂ©s de la sorte, et ce marqueur n’est jamais utilisĂ© pour l’Epistola ad Hasen regem. De plus, aucun passage de l’Epistola ad Hasen regem ne correspond Ă  l’intĂ©gralitĂ© de la citation du Speculum naturale, et cette derniĂšre contient aussi une citation de la version P De aluminibus et salibus non marquĂ©e par l’Alchimista. Cf. également ci-dessous p. 20.

Le passage SN, 7, 70c – SD, 11, 130b1, quant Ă  lui, est une citation de l’Epistola ad Hasen regem qui est attribuĂ©e Ă  l’Epistola ad Hasen regem dans le Speculum doctrinale, mais Ă  la Doctrina alchimiae dans le Speculum naturale. Cf. à ce sujet ci-dessous p. 20.

Il faut enfin mentionner la citation SN, 7, 67b, qui est une glose de Vincent de Beauvais (Actor) dans laquelle le passage SN, 7, 60b1 – SD, 11, 105d1 est partiellement repris (attribuĂ© Ă  la Doctrina alchimiae dans le SN et Ă  l’Alchimista dans le SD).

Le Liber de anima alchimique attribué à Avicenne

Le traité

Le De anima alchimique du pseudo-Avicenne, plus connu sous le nom de De anima in arte alchemiae (= DA), est la compilation et la traduction latine de trois traitĂ©s arabes perdus Ă  ce jour43. La traduction semble dater de 1226/ 123544, mais l’étape de compilation est impossible Ă  dater. Par ailleurs, il est impossible d’affirmer si le traitĂ© a d’abord Ă©tĂ© compilĂ© puis traduit, ou inversement : la date de traduction pourrait donc ne porter que sur une des trois parties de l’ouvrage. La premiĂšre partie du De anima est un traitĂ© de physique Ă©lĂ©mentaire, la Porta elementorum ; l’original arabe (perdu Ă  ce jour) a Ă©tĂ© rĂ©digĂ© avant le milieu du XIIe siĂšcle, et a probablement Ă©tĂ© traduit en Espagne ou par un traducteur connaissant le castillan, en raison de la transformation linguistique de certains mots45. Il existe une autre traduction latine du traitĂ© arabe dans le manuscrit Cotton Galba E IV, sous le titre De elementis, attribuĂ©e Ă  un certain Marius46. La deuxiĂšme partie du De anima, de loin la plus longue et la plus dĂ©taillĂ©e (environ 80 %), dĂ©crit l’alchimie du De anima : elle contient non seulement les principes thĂ©oriques de l’alchimie du De anima, mais aussi de nombreuses recettes. Elle a Ă©tĂ© composĂ©e entre le troisiĂšme quart du XIe siĂšcle et le milieu du XIIIe siĂšcle, en Andalus (Espagne islamique)47 ; elle a Ă©tĂ© traduite en Espagne ou par un traducteur connaissant le castillan, comme le montrent de nombreux mots castillans dans l’ouvrage. La troisiĂšme partie du De anima a vraisemblablement Ă©tĂ© insĂ©rĂ©e pour complĂ©ter la deuxiĂšme partie, dont la fin Ă©tait manquante. On en ignore la date et le lieu de composition ; on peut Ă©mettre l’hypothĂšse d’une traduction en Espagne ou par un traducteur connaissant le castillan, en raison de traces linguistiques48. Le traitĂ© est faussement attribuĂ© Ă  Avicenne49. L’alchimie du De anima est une alchimie de type jābirien50, basĂ©e spĂ©cifiquement sur les substances organiques : il propose de fabriquer les Ă©lixirs Ă  partir de substances organiques, le sang, les cheveux et les Ɠufs. Le traitĂ© est conservĂ© dans huit manuscrits51. Le De anima a Ă©tĂ© publiĂ© par Mino Celsi en 1572 Ă  BĂąle, chez Pietro Perna, dans un recueil intitulĂ© Artis chemicae principes, Avicenna atque Geber52.

L’utilisation par Vincent de Beauvais

Le De anima n’apparaĂźt pas dans les livres de la version bifaria qui sont conservĂ©s.

Le texte du De anima citĂ© par Vincent de Beauvais s’apparente Ă  la famille de manuscrits L C F V53 ; la version prĂ©sente dans le Speculum doctrinale est beaucoup plus proche de mon Ă©dition du De anima que celle du Speculum naturale, probablement en raison d’une corruption du texte du Speculum naturale. Il est cité 30 fois (16 dans le SN, 14 dans le SD), sous les marqueurs suivants : Avicenna in libro de anima, Avicenna in libro alchimie qui dicitur de anima, Avicenna in alchymia de anima, Avicenna in libro alchymie de anima, Avicenna in libro alchymie. Le De anima est toujours citĂ© dans le livre VII du Speculum naturale et dans le livre XI du Speculum doctrinale, et tous les extraits se retrouvent Ă  la fois dans le Speculum naturale et le Speculum doctrinale. L’attribution est toujours semblable entre le Speculum naturale et le Speculum doctrinale. Le De anima est principalement utilisĂ© par Vincent de Beauvais dans les descriptions des substances et des types d’opĂ©rations qui s’y rapportent. Il est Ă©galement citĂ© dans les chapitres spĂ©cialement consacrĂ©s aux opĂ©rations sur les substances dans l’alchimie. Seule la deuxiĂšme partie du De anima est citĂ©e : plus prĂ©cisĂ©ment encore, tous les extraits proviennent des dictiones54 1, 4 et 5.

Vincent de Beauvais n’emploie que les parties thĂ©oriques du De anima, sans reprendre de recette, alors que le De anima est un traitĂ© plus pratique que thĂ©orique, qui contient avant tout des recettes et des conseils techniques. En outre, Vincent de Beauvais ne conserve que des extraits comprĂ©hensibles du De anima, dont de nombreux passages sont obscurs. Le dominicain va jusqu’à supprimer des expressions qui posent problĂšme dans la phrase (par exemple en SN, 7, 61c – SD, 11, 119a1, oĂč est supprimĂ© le pro multo aere dont le sens est problĂ©matique Ă  premiĂšre lecture). Les citations ne sont pas toujours littĂ©rales, mais restent plus fidĂšles au texte que celles du De aluminibus et salibus (cf. ci-dessous 17), en contractant les extraits : Vincent de Beauvais omet des passages qui peuvent Ă©loigner le lecteur du sujet qu’il traite (par exemple SN, 7, 4a – SD, 11, 110a, ou bien SN, 7, 54b – SD, 11, 114b, ou encore SN, 7, 82b – SD, 11, 125b55). Contrairement aux citations du De aluminibus et salibus, celles du De anima conservent plusieurs transcriptions de mots arabes (par exemple en SN, 7, 13c – SD, 11, 111b, le mot orizum correspondant au ebrizum du De anima qui transcrit l’arabe ibrÄ«z, « or pur »). Parfois cependant, le rĂ©sumĂ© d’un long passage provoque la perte des arguments du texte, peut-ĂȘtre Ă  cause d’une mĂ©comprĂ©hension (comme dans le cas de SN, 7, 85b – SD, 11, 106b1).

Une citation particuliĂšre mĂ©rite qu’on s’y attarde. En SN, 7, 87a – SD, 11, 107a, on observe une liste de noms d’alchimistes qui font autoritĂ© dans le domaine, dont Vincent de Beauvais ne retient qu’une partie. Le De anima propose en effet une longue liste d’autoritĂ©s alchimiques, dont de nombreux noms ont Ă©tĂ© transcrits de l’arabe sans qu’on puisse en deviner l’origine, en raison de leur trop grande dĂ©formation ; Ă  cette liste d’autoritĂ©s mythiques, bibliques et arabes a Ă©tĂ© ajoutĂ©e une sĂ©rie de noms chrĂ©tiens, probablement par le traducteur (et/ou compilateur ?) du De anima56. Vincent de Beauvais limite sa citation aux autoritĂ©s bibliques et Ă  quelques auteurs arabes (uniquement les plus connus, comme Geber), et insiste surtout sur les autoritĂ©s chrĂ©tiennes. L’ordre de la liste reste relativement le mĂȘme, Ă  l’exception de Virgilius57, que le dominicain place beaucoup plus haut dans la liste, pour induire une plus grande cohĂ©rence typologique des autoritĂ©s.

La citation SN, 7, 4a – SD, 11, 110a contient une divergence thĂ©orique importante entre le Speculum naturale et le Speculum doctrinale (le nombre des mĂ©taux), qui s’explique par une corruption de la tradition manuscrite (cf. annexe).

Le De aluminibus et salibus

Le traité

Le De aluminibus et salibus (= DAES) est un traitĂ© anonyme arabe d’alchimie pratique qui a Ă©tĂ© traduit en hĂ©breu et en latin58. L’ouvrage est le plus souvent anonyme, parfois attribuĂ© Ă  HermĂšs, plus rarement Ă  RāzÄ« (dans le seul manuscrit Paris, BnF, Lat. 6514, f. 125r-v, et chez Vincent de Beauvais), probablement en raison du cĂŽtĂ© pratique de l’alchimie qu’il dĂ©crit. Son titre varie dans les manuscrits : on trouve notamment le titre De spiritibus et corporibus59, et c’est selon ce titre que Roger Bacon cite l’ouvrage. Il semble avoir Ă©tĂ© rĂ©digĂ© en Espagne au XIe ou au XIIe siĂšcle. La version arabe n’est conservĂ©e que partiellement dans le seul manuscrit Berlin, Staatsbibliothek, Sprenger 190860, elle a Ă©tĂ© Ă©ditĂ©e par Julius Ruska en 193561. Le texte latin existe selon dans trois versions diffĂ©rentes :

  1. une premiÚre version, appelée version P (= DAESP), éditée par Robert Steele (selon peu de manuscrits)62, qui est celle utilisée par Vincent de Beauvais ;

  2. une seconde version, nommĂ©e version G (= DAESG)63, en raison de son Ă©dition parmi les Ɠuvres de Jean de Garlande en 156064, Ă©ditĂ©e par Ruska aux cĂŽtĂ©s de la version arabe65, qui est celle utilisĂ©e par Roger Bacon ; Catherine Arbuthnott a identifiĂ© une autre copie de cette version dans le manuscrit Oxford, Bodleian Library, Digby 119, ff. 167v-175r, qu’elle appelle « Digby version »66 ;

  3. une troisiĂšme version, qui se prĂ©sente plus comme une adaptation qu’une traduction et qui ressemble Ă  la version P, dont on trouve des fragments dans le Liber claritatis Ă©ditĂ© par Darmstaedter67, appelĂ©e version L.cl.68.

L’ouvrage est rĂ©pertoriĂ© comme une traduction de GĂ©rard de CrĂ©mone dans la liste dressĂ©e par ses socii69. Toutefois, en l’absence d’études approfondies, il est difficile de dĂ©terminer, parmi les trois versions ci-dessus, quelle est la sienne. Une nouvelle Ă©dition de la version arabe et des fragments hĂ©breux est actuellement prĂ©parĂ©e par Gabriele Ferrario, et Catherine Arbuthnott70 travaille en ce moment Ă  l’édition critique de la version latine. Les Ă©ditions critiques et l’étude de la tradition manuscrite sont tout particuliĂšrement souhaitĂ©es, car elles permettront de se pencher sur le texte avec plus de prĂ©cision.

L’utilisation par Vincent de Beauvais

Le De aluminibus et salibus est utilisĂ© dans les livres de la version bifaria qui nous sont conservĂ©s ; il n’y est cependant citĂ© qu’une seule fois, au sujet de l’étain, sous le marqueur Ex libro de aluminibus et salibus. La citation (Bif., 5, 91c), une seule phrase trĂšs brĂšve, correspond au dĂ©but de la citation SN, 7, 38a – SD, 11, 115a et se termine dans les deux manuscrits par l’abrĂ©viation de l’expression et cetera71. Cela permet d’émettre deux hypothĂšses : soit Vincent de Beauvais l’a ajoutĂ© en toute fin de composition de la version bifaria, sans avoir le temps de l’utiliser davantage, soit il n’avait accĂšs qu’à une version partielle et il s’est procurĂ© le texte complet pour la version trifaria.

Le De aluminibus et salibus est citĂ© 32 fois72 (18 dans le SN, 14 dans le SD), sous les marqueurs suivants : Ex libro de aluminibus et salibus, Razi in libro de aluminibus et salibus, Razi in libro de aluminibus, Ex libro Razi de aluminibus et salibus. Vincent de Beauvais attribue l’ouvrage Ă  RāzÄ«. Il le cite dans les livres V (2 fois), VI (1 fois) et VII du Speculum naturale, et toujours dans le livre XI du Speculum doctrinale. Tous les extraits se retrouvent Ă  la fois dans le Speculum naturale et le Speculum doctrinale, toujours avec la mĂȘme attribution. Vincent de Beauvais utilise principalement le De aluminibus et salibus dans les descriptions des substances et les types d’opĂ©rations qui s’y rapportent, particuliĂšrement dans les chapitres spĂ©cialement consacrĂ©s aux opĂ©rations sur les substances dans l’alchimie, Ă  l’instar du De anima. Il n’a recours qu’aux parties thĂ©oriques du traitĂ©, alors que le De aluminibus et salibus est un traitĂ© trĂšs technique proposant de nombreuses informations pratiques.

Les citations du De aluminibus et salibus ne sont pas toujours littĂ©rales. Parfois Vincent de Beauvais ne cite que certaines parties de la description d’un produit (par exemple en SN, 5, 86a – SD, 11, 118a1, ou bien en SN, 7, 18b – SD, 11, 112a). TantĂŽt, il supprime des phrases chargĂ©es de sens mais sans rapport direct avec l’alchimie (par exemple en SN, 7, 6b – SD, 11, 105c)73. Contrairement aux citations du De anima, celles du De aluminibus et salibus ne comptent que peu de transcriptions de termes arabes, qui sont gĂ©nĂ©ralement Ă©cartĂ©es du texte (par exemple en SN, 5, 86a – SD, 11, 118a1, ou bien en SN, 7, 42c – SD, 11, 116a, ou encore en SN, 7, 75a – SD, 11, 122a1). Vincent de Beauvais supprime plusieurs passages Ă  la premiĂšre personne (par exemple en SN, 7, 67a – SD, 11, 118a3). Mais il est Ă©galement possible qu’il ait utilisĂ© une version abrĂ©gĂ©e qui ne nous est pas parvenue, ou qui n’est pas Ă©ditĂ©e. Ces omissions conduisent parfois Ă  des contresens importants (par exemple en SN, 7, 6b – SD, 11, 105c).

La citation SN, 7, 42c – SD, 11, 116a contient une transformation du texte : on lit dans le Speculum naturale « Convenerunt greci philosophi », et dans le Speculum doctrinale « Convenerunt inde philosophi », alors que le De aluminibus et salibus contient « Et convenerunt philosophi Indi ». Il s’agit en rĂ©alitĂ© d’une altĂ©ration du texte dans la tradition manuscrite (ou directement dans l’édition de Douai74) du Speculum naturale, car le manuscrit du Speculum naturale Paris, BnF, Lat. 14387, et le manuscrit du Speculum doctrinale Paris, BnF, Lat. 16100, donnent « Convenerunt indi philosophi »75.

La citation SD, 11, 122a est sans marqueur, mais correspond bien à un passage du De aluminibus et salibus (qui se retrouve en deux parties dans SN, 7, 75a et SN, 5, 94d).

Le De aluminibus et salibus comme source interne

J’ai pu identifier diffĂ©rents emplois du De aluminibus et salibus comme source interne dans d’autres citations. L’Alchimista cite la version P du De aluminibus et salibus en SN, 7, 91a – SD, 11, 128a et en SN, 7, 91c – SD, 11, 128c (cf. ci-dessus p. 10). Le Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham et le Philosophus citent la version G du De aluminibus et salibus en plusieurs endroits (cf. ci-dessous p. 28 et 32).

Les citations internes dans le De aluminibus et salibus chez Vincent de Beauvais

Dans les citations du De aluminibus et salibus que fait Vincent de Beauvais, certaines contiennent elles-mĂȘmes des citations internes marquĂ©es, c’est-Ă -dire des citations d’autres auteurs dĂ©jĂ  prĂ©sentes dans le De aluminibus et salibus et, par consĂ©quent, reprises dans les extraits citĂ©s. Ainsi, on trouve une citation d’un certain Armenides (un pseudo-ParmĂ©nide alchimique ?) en SN, 7, 42c – SD, 11, 116a, et une citation de Geber en SN, 7, 75a – SD, 11, 122a1. Je n’ai pas investiguĂ© davantage ces citations internes, qui sont celles du De aluminibus et salibus lui-mĂȘme. Il faut aussi souligner les citations SN, 7, 90a – SD, 11, 127a, dans lesquelles Vincent de Beauvais reprend une citation de Geber faite dans le De aluminibus et salibus sans mentionner le nom de Geber, alors qu’il figure dans le De aluminibus et salibus.

L’Epistola ad Hasen regem de re tecta d’Avicenne

Le traité

L’Epistola ad Hasen regem de re tecta (= EAHR) est la traduction latine d’un traitĂ© alchimique arabe, la Risālat al-iksÄ«r (EpĂźtre sur l’élixir), attribuĂ© Ă  Avicenne (980-1037)76. Plusieurs savants se sont penchĂ©s sur la question de l’authenticitĂ© de ce traitĂ©, qui pourrait ĂȘtre une Ɠuvre vĂ©ritable du philosophe persan. Ruska en avait rejetĂ© l’authenticitĂ© pour trois raisons : Avicenne se prononce contre la transmutation des espĂšces, le dĂ©dicataire de l’épĂźtre, le cheik AbĆ« al-កasan Sahl ibn Muáž„ammad al-SahlÄ«, est inconnu, et plusieurs toponymes dans la version latine se rapportent Ă  l’Occident arabe. Il supposait donc une rĂ©daction plus tardive, en Andalus. Ahmed Atech rĂ©fute les arguments de Ruska : l’épĂźtre porte sur la teinture des mĂ©taux, et non sur leur transmutation, le dĂ©dicataire inconnu pourrait bien ĂȘtre AbĆ« al-កusayn Aáž„mad ibn Muáž„ammad al-SahlÄ«, vizir de Khwārizmshāh ‘AlÄ«, qui offrit sa protection Ă  Avicenne lorsqu’il vint au Khwārizm, et le texte arabe ne comporte aucun toponyme occidental, Ruska s’est laissĂ© abuser par la version latine. La question reste dĂ©battue cependant. L’affirmation d’Atech au sujet de la teinture est sujette Ă  caution, car l’Epistola ad Hasen regem propose l’emploi d’élixirs, dont le principe d’action porte sur les Ă©lĂ©ments et est censĂ© transmuter complĂštement le mĂ©tal. Stapleton, quant Ă  lui, rĂ©sout le problĂšme en supposant qu’Avicenne a changĂ© d’avis entre la rĂ©daction de la Risālat al-iksÄ«r et le Kitāb al-ma‘ādin wa al-āthār al-‘ulwiyya. L’alchimie prĂŽnĂ©e dans l’Epistola ad Hasen regem s’inspire notamment de celle de RāzÄ« et, par voie de consĂ©quence, de celle des traitĂ©s jābiriens.

L’utilisation par Vincent de Beauvais

L’Epistola ad Hasen regem n’apparaĂźt pas dans les livres de la version bifaria qui sont conservĂ©s.

Elle est citĂ©e 7 fois dans la trifaria (4 dans le SN, 3 dans le SD)77, sous les marqueurs suivants : Avicenna in epistola ad Basem, Avicenna in epistola ad Hasen, Ex epistola Avicenne ad Hasen. Les citations se trouvent toutes dans le livre VII du Speculum naturale et dans le livre XI du Speculum doctrinale. Toutes se retrouvent Ă  la fois dans le Speculum naturale et dans le Speculum doctrinale. L’Epistola ad Hasen regem est utilisĂ©e par Vincent de Beauvais principalement dans la description des procĂ©dĂ©s alchimiques et des opĂ©rations sur les substances. Les passages citĂ©s ne sont jamais des recettes ni des descriptions trĂšs techniques, comme pour le De anima alchimique et le De aluminibus et salibus. Les citations, assez littĂ©rales, sont souvent rĂ©sumĂ©es, en gardant cependant des morceaux de phrases complets (par exemple en SN, 7, 93b – SD, 11, 130b). Comme dans le De aluminibus et salibus, Vincent de Beauvais supprime un certain nombre de passages Ă  la premiĂšre personne78 (par exemple en SN, 7, 93b – SD, 11, 130b), tout en en conservant quelques-uns (par exemple en SN, 7, 70c – SD, 11, 130b1).

La citation SN, 7, 83a – SD, 11, 126a est particuliĂšrement intĂ©ressante, car elle est suivie dans les deux ouvrages d’un assez long commentaire intitulĂ© Glossa (SN, 7, 83b – SD, 11, 126b). Cette glose n’est pas le fait de Vincent de Beauvais, car elle contient des donnĂ©es alchimiques assez Ă©laborĂ©es et surtout une rĂ©fĂ©rence Ă  Morien, prĂ©cisĂ©ment au Liber de compositione alchimiae, une traduction latine d’un traitĂ© alchimique arabe, la Risālat Maryānus al-Rāhib al-áž„akÄ«m li-al-amÄ«r Khālid ibn YazÄ«d (EpĂźtre du moine Morien le sage au prince Khālid ibn YazÄ«d), que Vincent de Beauvais ne cite jamais. S’il avait eu un exemplaire du Morienus, il l’aurait certainement utilisĂ©, car ce traitĂ© est une autoritĂ© importante : il est par exemple mentionnĂ© dans le De anima alchimique, que Vincent de Beauvais possĂ©dait, mais il s’agit ici d’un autre passage (la citation ne peut donc pas avoir Ă©tĂ© tirĂ©e du De anima).

La citation SN, 7, 70c, qui correspond Ă  la premiĂšre partie de la citation SD, 11, 130b et qui est manifestement tirĂ©e de l’Epistola ad Hasen regem, est marquĂ©e comme venant de l’Epistola ad Hasen regem dans le Speculum doctrinale et est attribuĂ©e Ă  la Doctrina alchimiae dans le Speculum naturale ; cette attribution se retrouve dans le manuscrit du Speculum naturale Paris, BnF, Lat. 14387. L’hypothĂšse d’une confusion de marqueurs par Vincent de Beauvais est Ă  retenir, car la citation SN, 7, 70c est reprise mot pour mot dans le Speculum doctrinale, et y est attribuĂ©e Ă  l’Epistola ad Hasen regem ; il est trĂšs peu probable qu’il s’agisse d’une citation interne, parce que l’unique citation interne de l’Epistola ad Hasen regem dans la Doctrina alchimiae en SN, 7, 88a1 est assez Ă©loignĂ©e de l’original.

La citation SN, 7, 92a – SD, 11, 129a est trĂšs lĂ©gĂšrement tronquĂ©e dans le Speculum naturale, en raison d’une corruption de la tradition manuscrite : le manuscrit du Speculum naturale Paris, BnF, Lat. 14387 contient en effet la partie manquante dans l’édition de Douai.

L’Epistola ad Hasen regem comme source interne

L’Epistola ad Hasen regem est citĂ©e dans l’Alchimista en SN, 7, 91a – SD, 11, 128a et en SN, 7, 91c – SD, 11, 128c, ce qui a causĂ© une erreur de marqueur dans le SD (cf. ci-dessus p. 10).

L’Epistola ad Hasen regem est Ă©galement citĂ©e comme source interne dans la Doctrina alchimiae en SN, 7, 88a1 (cf. ci-dessus p. 10).

 

Les collectes non exhaustives : les traitĂ©s s’attardant sur l’alchimie

Les MĂ©tĂ©orologiques d’Aristote et le De mineralibus d’Avicenne

Les traités

Les MĂ©tĂ©orologiques d’Aristote et le De mineralibus d’Avicenne79 sont ici groupĂ©s sous le mĂȘme intitulĂ©, car Vincent de Beauvais les traite sous le mĂȘme groupe de marqueurs. La version latine des MĂ©tĂ©orologiques d’Aristote est le rĂ©sultat d’une traduction dont l’histoire est assez complexe : les trois premiers livres ont Ă©tĂ© traduits de l’arabe (Ă  partir d’un abrĂ©gĂ©) par GĂ©rard de CrĂ©mone80 († 1187), et le quatriĂšme livre (= 4Met) a Ă©tĂ© traduit du grec par Henri Aristippe81 († 1162). Cependant, dans les annĂ©es 116082, Alfred de Sareshill dĂ©cide de pallier un manque dans le quatriĂšme livre d’Aristote, qui affirmait Ă  la fin du livre III qu’il allait s’attarder sur les mĂ©taux, qui ne sont cependant pas dĂ©crits dans le livre IV. Pour ce faire, il traduit et rĂ©sume une partie du cinquiĂšme fann des áč­abī‘iyyāt (physiques) du Kitāb al-Shifā’ d’Avicenne (980-1037), intitulĂ© Kitāb al-ma‘ādin wa al-āthār al-‘ulwiyya83 (Livre des minĂ©raux et des phĂ©nomĂšnes cĂ©lestes) : il postule en effet probablement qu’Avicenne a utilisĂ© le texte perdu d’Aristote pour composer son propre texte, et tente donc de reconstruire le discours d’Aristote Ă  partir de celui d’Avicenne84. Cette traduction, intitulĂ©e De mineralibus (= DM), et plus souvent connue sous le titre erronĂ© de De congelatione et conglutinatione lapidum85, fut adjointe par Alfred de Sareshill Ă  la fin du livre IV des MĂ©tĂ©orologiques, et fut ensuite considĂ©rĂ©e par la plupart des auteurs comme une Ɠuvre authentique d’Aristote86. L’autoritĂ© d’Aristote confĂ©ra un grand succĂšs Ă  cette traduction. Pour corser le tout, le De mineralibus d’Avicenne circula Ă©galement comme un traitĂ© Ă  part entiĂšre, sĂ©parĂ© des MĂ©tĂ©orologiques.

Il existe en outre une autre traduction, intĂ©grale, des MĂ©tĂ©orologiques d’Avicenne (et non d’Aristote), rĂ©alisĂ©e vers 1270 par JuĂĄn GonzĂĄlez, avec l’aide du Juif Salomon, Ă  la demande de l’évĂȘque de Burgos87.

L’utilisation par Vincent de Beauvais

Les MĂ©tĂ©orologiques d’Aristote sont citĂ©s abondamment dans les livres de la version bifaria qui sont conservĂ©s. Ce sont surtout les livres I, II et III, mais on trouve Ă©galement des citations du De mineralibus. Concernant l’alchimie, seul le De mineralibus est citĂ©, sous les marqueurs in libro quarto metheorum Aristotilis in additis et ex quarto libro metheororum in additis. On lit 4 citations du De mineralibus, dont 3 portant de prĂšs ou de loin sur l’alchimie88 :

  1. Bif., 5, 49d89 (= SN, 5, 80d, qui correspond à une partie de SN, 7, 79b – Bif., 5, 96a) : chapitre De lapidibus qui ex aquis fiunt (= SN, 5, 80).

  2. Bif., 5, 79b (= SN, 7, 2a – SD, 11, 109a1) : chapitre De mineris terre (= SN, 7, 1-2).

  3. Bif., 5, 96a1 (= SN, 7, 79b, dont un partie se retrouve en SN, 5, 80d – Bif., 5, 49d) : chapitre De lapidibus mineralibus ;

Bif., 5, 96a2 (= SN, 7, 80a – SD, 11, 123b).

Dans la version trifaria, le corpus des citations des Meteora est Ă©largi ; les MĂ©tĂ©orologiques d’Aristote et le De mineralibus sont une des bases thĂ©oriques importantes pour Vincent de Beauvais dans le sujet de la minĂ©ralogie et de l’alchimie. Pour le livre III des MĂ©tĂ©orologiques (= 3Met), Vincent de Beauvais utilise la traduction de GĂ©rard de CrĂ©mone. Pour le livre IV, il cite la version d’Henri Aristippe90. Pour le De mineralibus, il reprend la traduction d’Alfred de Sareshill (cf. infra). Les citations portant sur l’alchimie que Vincent de Beauvais attribue aux Meteora sont au nombre de 24 (19 dans le SN, 5 dans le SD). Parmi elles, le livre III est citĂ© 2 fois, uniquement dans le Speculum naturale, le livre IV est citĂ© 5 fois, uniquement dans le Speculum naturale, et le De mineralibus est citĂ© 19 fois (14 dans le SN et 5 dans le SD)91. La situation est assez complexe. Les livres III et IV des MĂ©tĂ©orologiques d’Aristote ne sont jamais citĂ©s dans le Speculum doctrinale au sujet de l’alchimie (c’est-Ă -dire dans les citations prises en compte ici) : seul le De mineralibus d’Avicenne est citĂ© Ă  la fois dans les extraits traitĂ©s du Speculum naturale et du Speculum doctrinale. Les citations des Meteora relevĂ©es se trouvent dans le livre V (1 citation) et dans le livre VII du Speculum naturale, et dans le livre XI du Speculum doctrinale. Les marqueurs utilisĂ©s sont les suivants :

  1. pour le livre III des Météorologiques : Aristoteles in libro IIIo meteororum ;

  2. pour le livre IV des Météorologiques et le De mineralibus, on trouve deux types de marqueurs :

  3. Aristoteles in libro quarto meteororum, Aristoteles ubi supra libro IVo, Ex libro IVo meteororum, Ex libro IVo metheororum, Ex libro meteororum quarto, Ex libro meteororum IVo, Ex libro IVo, Idem in libro IVo ;

  4. Ex additis libri quarti meteororum, Ex additis IVi libri meteororum Aristotelis, Ex additis quarti libri meteororum.

Sous le premier marqueur (1) se retrouvent uniquement les citations du livre III des MĂ©tĂ©orologiques. Pour le second (2), on s’attendrait Ă  voir le livre IV des MĂ©tĂ©orologiques sous Aristoteles in libro quarto meteororum (a) et le De mineralibus citĂ© sous l’intitulĂ© Ex additis libri quarti meteororum (b) (= 4MetA), puisque le De mineralibus est prĂ©cisĂ©ment un ajout au livre IV des MĂ©tĂ©orologiques d’Aristote, mais ce n’est pas exactement le cas. On remarque que le Speculum doctrinale, qui cite uniquement le De mineralibus dans les citations examinĂ©es ici, le fait toujours sous l’intitulĂ© Ex additis libri quarti meteororum. Dans le Speculum naturale, si le livre IV des MĂ©tĂ©orologiques est toujours mentionnĂ© sous l’intitulĂ© qui lui correspond (a), le De mineralibus, en revanche, est citĂ© sous l’intitulĂ© correct Ex additis libri quarti meteororum (b, i.e. 4MetA) dans le livre V, mais est citĂ© sous le marqueur Aristoteles in libro quarto meteororum (a) dans tout le livre VII. En outre, le livre VII du Speculum naturale contient deux citations composites (SN, 7, 24a et SN, 7, 40b), c’est-Ă -dire des extraits qui contiennent des passages du livre IV des MĂ©tĂ©orologiques et du De mineralibus, toutes les deux intitulĂ©es selon le livre IV (a). Ces marqueurs se retrouvent dans le manuscrit du Speculum naturale Paris, BnF, Lat. 14387 et dans le manuscrit du Speculum doctrinale Paris, BnF, Lat. 16100. Dans la version bifaria, on lit dĂ©jĂ  le marqueur in libro III° metheororum Aristotilis in additis (Bif., 5, 49d, Bif., 5, 79b, Bif., 5, 96a) et ex quarto libro metheororum in additis (Bif., 5, 63c). Ainsi, Vincent de Beauvais savait que l’attribution Ă  Aristote de la fin du livre IV des MĂ©tĂ©orologiques Ă©tait mise en doute par certains (Albert le Grand, par exemple92).

À cette discussion s’ajoute un passage de l’Actor (cf. ci-dessous p. 35), Ă  la fin de la citation SN, 7, 85a, c’est-Ă -dire dans le chapitre sur la question de la possibilitĂ© de la transmutation (Quod vere fiat eorum transmutatio vel potius disgregatio per alchymiam) :

« (...) Quelques-uns Ă©galement disent que ce dernier chapitre des MĂ©tĂ©ores, dans lequel il est question de la transmutation des mĂ©taux, n’est pas d’Aristote, mais un ajout (tirĂ©) des propos d’un autre auteur. »93

Cette derniĂšre phrase sur l’attribution des MĂ©tĂ©orologiques ne se trouve toutefois pas dans l’extrait du Speculum doctrinale correspondant, le SD, 11, 106a, tant dans l’édition de Douai que dans le manuscrit Paris, BnF, Lat. 16100, alors qu’on le retrouve dans tous les tĂ©moins examinĂ©s du Speculum naturale94 (cf. annexe).

Ce faisceau d’indices semble indiquer que, lors de la compilation du livre VII du Speculum naturale et des livres XI et XV du Speculum doctrinale, le travail sur les citations du livre IV des MĂ©tĂ©orologiques et du De mineralibus a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© par diffĂ©rents socii95. Les citations du De mineralibus dans le Speculum doctrinale sont intitulĂ©es de la mĂȘme maniĂšre que dans la bifaria, c’est-Ă -dire considĂ©rĂ©es comme un ajout au livre IV des MĂ©tĂ©orologiques, tandis que celles du livre VII du Speculum naturale sont toutes considĂ©rĂ©es comme des extraits authentiques : les socii qui ont travaillĂ© sur le livre VII du Speculum naturale ignoraient probablement que la fin du livre IV des MĂ©tĂ©orologiques Ă©tait sujette Ă  caution, ce qui a provoquĂ© l’erreur de marqueurs. La glose de l’Actor pour prĂ©ciser que l’attribution est douteuse aura Ă©tĂ© ajoutĂ©e lors de la rĂ©vision du livre VII du Speculum naturale (peut-ĂȘtre par Vincent de Beauvais lui-mĂȘme) ; et puisque les marqueurs du Speculum doctrinale Ă©taient les bons, la glose n’était pas nĂ©cessaire dans le Speculum doctrinale. Cependant, il ne s’agit que d’une hypothĂšse, et la prĂ©sence de marqueurs ex additis libri quarti meteororum dans le livre V oblige Ă  supposer dans ce cas que le livre VII et le livre V du Speculum naturale ont Ă©tĂ© compilĂ©s par diffĂ©rents socii.

Vincent de Beauvais utilise principalement les livres III et IV des MĂ©tĂ©orologiques ainsi que le De mineralibus dans les descriptions de substances, mais aussi quelques fois dans les descriptions d’opĂ©rations alchimiques sur ces substances. Il traite diffĂ©remment les citations. Les citations du livre III des MĂ©tĂ©orologiques sont trĂšs peu littĂ©rales, elles sont toutes les deux trĂšs rĂ©sumĂ©es ; cependant, les expressions citĂ©es sont bien composĂ©es des mĂȘmes mots que la traduction de GĂ©rard, il n’y a donc pas de doute quant Ă  la version utilisĂ©e (cf. annexe). Il en va de mĂȘme pour le livre IV des MĂ©tĂ©orologiques : Vincent de Beauvais rĂ©sume fortement le texte. Il synthĂ©tise parfois plusieurs pages en quelques lignes (par exemple en SN, 7, 24b1). En revanche, le De mineralibus n’est pas abrĂ©gé ; il est citĂ© trĂšs littĂ©ralement Ă  l’exception du passage SN, 7, 40b2. Au sujet du De mineralibus, il faut prĂ©ciser que le texte n’a jamais Ă©tĂ© Ă©ditĂ© de façon critique96 ; pour identifier les citations, j’ai utilisĂ© la version Ă©ditĂ©e par Holmyard et Mandeville97, qui est une Ă©dition diplomatique du manuscrit Cambridge, Trinity College, O. 8-25 (ou ms. 1400), du XVe siĂšcle, avec les variantes d’autres manuscrits en apparat. En identifiant les extraits du Speculum maius, j’ai remarquĂ© que Vincent de Beauvais utilisait une version du De mineralibus qui Ă©tait plus proche de celle prĂ©sente dans le manuscrit Cambridge, Trinity College, O. 2-18 (ou ms. 1122), Ă©galement du XVe siĂšcle, donnĂ© en apparat par Holmyard et Mandeville (sigle TB), et parfois Ă©galement de l’édition de Bologne98 (sigle B). Ces rapprochements ne sont cependant pas significatifs, car les manuscrits pris en compte par Holmyard et Mandeville sont fort tardifs. Afin de permettre au lecteur d’observer les liens entre le De mineralibus et le texte de Vincent de Beauvais, j’ai changĂ© la version Ă©ditĂ©e par Holmyard et Mandeville en prenant dans l’apparat les leçons qui s’apparentent Ă  celles de Vincent de Beauvais, et j’ai parfois corrigĂ© le texte quand il s’agit d’erreurs Ă©videntes : tout changement est notĂ© par le soulignement du texte. Il ne s’agit donc pas d’une Ă©dition critique, mais uniquement d’un choix de leçons permettant de voir le lien entre le De mineralibus et le texte de Vincent de Beauvais, en attendant une Ă©dition critique valable du De mineralibus. J’ai Ă©galement insĂ©rĂ© dans le texte une ponctuation rudimentaire.

Vincent de Beauvais cite Ă  plusieurs reprises le Sciant artifices, un passage du De mineralibus trĂšs dĂ©battu au Moyen Âge, dans lequel Avicenne (considĂ©rĂ© comme Aristote par Vincent de Beauvais, avec la rĂ©serve mentionnĂ©e ci-dessus) se prononce contre la possibilitĂ© de transmuter les espĂšces99 : dans le SN, 7, 42a, dans un chapitre consacrĂ© aux opĂ©rations sur le plomb, et dans la citation SN, 7, 84b – SD, 11, 131b, c’est-Ă -dire dans le chapitre portant sur la modalitĂ© de la transmutation dans le Speculum naturale (Qualiter per hunc lapidem fiat metallorum transmutatio secundum quosdam) et dans le Speculum doctrinale (Qualis fiat per elixir metallorum transmutatio, secundum quosdam). Enfin, il y est fait allusion dans la glose de l’Actor qui a Ă©tĂ© citĂ©e ci-dessus, en mentionnant que certains affirment qu’il ne s’agit pas d’un passage authentique d’Aristote. Il est Ă©galement intĂ©ressant et amusant de voir que cette glose est suivie dans le Speculum naturale d’une citation du De anima alchimique (SN, 7, 85b – SD, 11, 106b1) dans laquelle le pseudo-Avicenne dĂ©fend la possibilitĂ© de la transmutation : ainsi, Vincent de Beauvais propose un texte qu’il pense ĂȘtre d’Avicenne (le De anima alchimique) comme opinion contraire Ă  un texte qu’il pense ĂȘtre d’Aristote (mais l’attribution est mise en doute, glose-t-il), mais il utilise en rĂ©alitĂ© le pseudo-Avicenne (le De anima alchimique) pour mettre en contraste les propos du vĂ©ritable Avicenne (le De mineralibus).

Les citations SD, 11, 109a et SD, 11, 120a regroupent chacune plusieurs citations du livre VII du Speculum naturale, au contraire des citations Speculum doctrinale, 11, 123b et SD, 11, 131b, qui correspondent chacune à une citation dans le livre VII du Speculum naturale, bien que le texte des deux versions soit un peu différent.

En SN, 7, 75c – SD, 11, 109a4, Vincent de Beauvais change lĂ©gĂšrement le texte en fin de passage, ce qui cause un contresens.

La citation SN, 7, 80a – SD, 11, 123b – SD, 15, 64b prĂ©sente des leçons particuliĂšres. On observe dans le Speculum doctrinale (deux fois) que les lieux gĂ©ographiques sont tous suivis d’un alias puis d’une autre leçon ; ces ajouts ne se retrouvent pas dans le manuscrit du Speculum doctrinale Paris, BnF, Lat. 16100. En outre, l’édition de Douai propose au milieu de l’extrait le mot Persia dans le Speculum naturale et Parthica alias Parthia dans le Speculum doctrinale : les leçons Parthia et Persia se trouvent toutes les deux dans les manuscrits du De mineralibus 100. Le manuscrit du Speculum naturale Paris, BnF, Lat. 14387 comporte quant Ă  lui Parthica, et le manuscrit du Speculum doctrinale Paris, BnF, Lat. 16100 note Pertica. Cette observation est d’importance pour l’établissement de l’histoire du texte de l’édition de Douai, qui est tributaire de l’édition de Strasbourg de 1476.

Le livre IV des Météorologiques comme source interne

Le livre IV des Météorologiques est cité de maniÚre indirecte dans les citations du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham sous le marqueur Liber de natura/is rerum en SN, 6, 82a2 et SN, 6, 83a.

Le Liber de natura rerum

Les traités

Quand il cite le Liber de natura rerum au sujet de l’alchimie, Vincent de Beauvais se rĂ©fĂšre sans les distinguer Ă  deux Ɠuvres : le Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© (= LDNRTh), et le Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham101 (= LDNRFo).

Le Liber de natura rerum est une encyclopĂ©die en 19 livres rĂ©digĂ©e durant quinze annĂ©es par le dominicain Thomas de CantimprĂ©102, terminĂ©e aux alentours de 1237-1240. Il y eut au moins trois versions successives du vivant mĂȘme de l’auteur : ces recensions sont appelĂ©es Thomas I, II (en 20 livres, complĂ©tĂ©e avant 1240) et III (difficile Ă  dater prĂ©cisĂ©ment)103. Son Ɠuvre a joui d’un succĂšs considĂ©rable, en particulier les passages relatifs aux animaux.

Le Liber de naturis rerum est une encyclopĂ©die moralisĂ©e104 faussement attribuĂ©e Ă  John Folsham (1300-1348), un carmĂ©lite anglais, et probablement rĂ©digĂ©e entre 1220 et 1240, mais cette datation est relative car elle ne repose que sur les sources de l’ouvrage. Une seule version est signalĂ©e dans cinq manuscrits, tous incomplets.

Deux hypothĂšses apparaissent. Il pourrait s’agir de deux traitĂ©s distincts que Vincent de Beauvais cite sous le mĂȘme marqueur, mais l’hypothĂšse est peu probante, car ce n’est pas dans les habitudes du dominicain, et il faudrait alors supposer une erreur des socii. La seconde hypothĂšse, beaucoup plus vraisemblable, est que Vincent de Beauvais possĂ©dait un manuscrit intitulĂ© Liber de natura/is rerum qui contenait un texte composĂ© Ă  la fois du Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© et du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham. À cette hypothĂšse s’ajoute le cas du manuscrit Bernkastel-Kues, Bibliothek des Sint-Nikolaus-Hospitals, Cusanus 203 (fin XIIIe s.), dans lequel se trouve une version incomplĂšte du Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© (ff. 3r-78r) Ă  laquelle sont ajoutĂ©s quelques passages du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham (ff. 78v-84v) ; ce manuscrit n’est pas celui utilisĂ© par Vincent de Beauvais, car le dominicain cite le Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© presque intĂ©gralement, mais l’exemple du Cusanus 203 montre que des versions contenant Ă  la fois le Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© et le Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham circulaient. En outre, une citation de l’Actor en SD, 15, 32b semble indiquer que Vincent de Beauvais utilisait une compilation105 : c’est peut-ĂȘtre du Liber de natura/is rerum qu’il s’agit, ou encore du Philosophus (cf. ci-dessous p. 32).

Le marqueur Liber de natura/is rerum semble avoir des liens avec le Philosophus, car plusieurs passages de ce dernier sont Ă©galement des citations des Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© et Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham. La citation SN, 7, 36c – SD, 15, 60b2 en particulier est attribuĂ©e au Liber de natura/is rerum dans le Speculum naturale et au Philosophus dans le Speculum doctrinale (cf. ci-dessous p. 32).

En Ă©tudiant le Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham, j’ai identifiĂ© des citations internes, dont certaines n’ont pas Ă©tĂ© remarquĂ©es par Abramov106 :

  1. trois citations assez littĂ©rales de la version G De aluminibus et salibus, toutes rĂ©pertoriĂ©es par Abramov : SN, 6, 79c1 ; SN, 7, 24a1 – SD, 15, 60a1 ; SN, 7, 26c1 ; SN, 7, 38d ;

  2. deux citations trĂšs rĂ©sumĂ©es du livre IV des MĂ©tĂ©orologiques, qu’Abramov a partiellement retrouvĂ©es : SN, 6, 82a2 ; SN, 6, 83a.

  3. quatre citations assez littĂ©rales des Quaestiones Nicolai Peripatetici (cf. ci-dessous p. 31), dont Abramov ignorait l’utilisation par le pseudo-John Folsham : SN, 6, 79c2 ; SN, 7, 7b3 ; SN, 7, 18d2 ; SN, 7, 52a.

En outre, les citations du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham portant sur l’alchimie qui sont reprises par Vincent de Beauvais comportent une citation interne du Circa instans (SN, 7, 61f), identifiĂ©e par Abramov (cf. annexe).

L’utilisation par Vincent de Beauvais

Le Liber de natura rerum est cité 3 fois dans les livres de la version bifaria qui sont conservĂ©s, aux chapitres De iacincto et iunco et iusquiamo (Bif., 6, 40f), De tamarice et taxo et terebinto (Bif., 7, 49j) et De vite (Bif., 7, 51f), mais jamais au sujet de l’alchimie.

Dans les passages de la version trifaria concernant l’alchimie, le marqueur Liber de natura/is rerum est citĂ© 21 fois (15 dans le SN, 6 dans le SD). Parmi ces citations, le Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© est citĂ© 5 fois dans le Speculum naturale, et 5 fois dans le Speculum doctrinale107, et le Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham est citĂ© 9 fois dans le Speculum naturale, et 1 fois dans le Speculum doctrinale108. A cela, il faut ajouter une citation composite dans le Speculum naturale, qui contient Ă  la fois un passage du Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© et un passage du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham (SN, 7, 7b). Ces citations se retrouvent dans les livres 6 et 7 du Speculum naturale et dans le livre XV du Speculum doctrinale (jamais dans le livre XI). Les marqueurs, utilisĂ©s indistinctement, sont : Ex libro de natura rerum (le seul utilisĂ© dans le Speculum doctrinale), Ex libro de naturis rerum. En outre, les citations dans le Speculum doctrinale sont presque toutes tirĂ©es du Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ©, Ă  l’exception de SD, 15, 60a. Il faut ajouter Ă  l’inverse que, quand le Speculum naturale contient une citation sur l’alchimie marquĂ©e Liber de natura/is rerum qui n’est pas reprise dans le Speculum doctrinale, il s’agit alors toujours du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham.

Le Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© est principalement utilisĂ© par Vincent de Beauvais pour des descriptions de substances. Les citations sont littĂ©rales. Une citation dans le Speculum doctrinale (SD, 15, 58a, partiellement reprise en SN, 7, 7b1) comporte des extraits littĂ©raux dont l’ordre a Ă©tĂ© modifié : on peut identifier trois segments dans la citation (cf. annexe). Le Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© citĂ© par Vincent de Beauvais correspond au Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© Ă©ditĂ© par Boese, mais il est difficile de se prononcer prĂ©cisĂ©ment entre Thomas I et Thomas II, bien que les identifications semblent indiquer plutĂŽt l’utilisation de Thomas I109.

Vincent de Beauvais a recours au Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham principalement dans des descriptions de substances et dans des descriptions d’opĂ©rations qui s’y rapportent. Les citations de cet ouvrage sont gĂ©nĂ©ralement littĂ©rales, mais montrent clairement un travail de rĂ©organisation. Cette rĂ©organisation pourrait ĂȘtre le fait de Vincent de Beauvais et de ses collaborateurs ou bien de l’auteur de la compilation qu’il a utilisĂ©e.

Dans le passage SN, 7, 18d2, l’introduction d’un non dans le texte du Speculum naturale introduit un contresens.

Le Liber de natura rerum de Thomas de Cantimpré et le Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham comme sources internes

Le Liber de natura rerum de Thomas de Cantimpré et le Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham sont cités sous le marqueur Philosophus.

Le Liber de vaporibus attribué à AverroÚs

Le traité

Quand Vincent de Beauvais cite un Liber de vaporibus (= DVap) qu’il attribue Ă  AverroĂšs, il s’agit en rĂ©alitĂ© d’un traitĂ© mieux connu sous le nom de Quaestiones Nicolai Peripatetici (= QNP)110. Les Quaestiones Nicolai Peripatetici sont un ouvrage pseudĂ©pigraphique contenant diverses quaestiones relatives Ă  la philosophie de la nature, qui est attribuĂ© Ă  Michel Scot par Albert le Grand dans son commentaire aux MĂ©tĂ©orologiques d’Aristote111, et Ă  AverroĂšs par Gilbert l’Anglais dans son Compendium medicinae et par Vincent de Beauvais dans son Speculum maius. Dans les manuscrits du texte112, le traitĂ© est attribuĂ© une fois Ă  Nicolas le PĂ©ripatĂ©ticien, une fois Ă  Alpharabi, c’est-Ă -dire le philosophe AbĆ« NaáčŁr al-FārābÄ«, une fois Ă  Avicenne, et une fois Ă  AverroĂšs (sous le titre De vi informativa, copie ne contenant que les deux chapitres sur la physiognomonie), les autres copies Ă©tant anonymes. StanisƂaw Wielgus Ă©carte les hypothĂšses d’attribution Ă  tous ces auteurs Ă  l’exception de Michel Scot, tout en gardant une rĂ©serve, car Michel Scot est le traducteur de plusieurs Ɠuvres d’AverroĂšs. Il semble plus prudent de considĂ©rer l’ouvrage comme anonyme. Wielgus observe que les Quaestiones Nicolai Peripatetici apparaissent dans la plupart des manuscrits parmi des Ɠuvres d’AverroĂšs, et que le contenu des Quaestiones Nicolai Peripatetici est influencĂ© de maniĂšre directe par un passage du commentaire d’AverroĂšs Ă  la MĂ©taphysique d’Aristote, et de maniĂšre indirecte par tout le livre XII de cette Ɠuvre : il Ă©met l’hypothĂšse d’y voir les causes, entre autres, de l’attribution Ă  AverroĂšs chez Vincent de Beauvais et Gilbert l’Anglais113. La datation du traitĂ© semble indiquer le XIIIe siĂšcle, elle se situe entre la composition du commentaire d’AverroĂšs (1126-1198) Ă  la MĂ©taphysique d’Aristote, qui est citĂ© dans les Quaestiones Nicolai Peripatetici, et la rĂ©daction du Compendium medicinae (c. 1230-1240) de Gilbert l’Anglais.

L’utilisation par Vincent de Beauvais

Les Quaestiones Nicolai Peripatetici n’apparaissent pas dans les livres de la version bifaria qui sont conservĂ©s.

Les passages relatifs Ă  l’alchimie dans les Quaestiones Nicolai Peripatetici reprĂ©sentent 10 citations chez Vincent de Beauvais, toujours dans le livre VII du Speculum naturale114. Les Quaestiones Nicolai Peripatetici ne sont jamais citĂ©es dans le Speculum doctrinale, y compris Ă  propos d’autres sujets que l’alchimie : le fait est important, mais difficile Ă  interprĂ©ter. Les marqueurs sont : Averroes ex libro de vaporibus, Ex libro Averrois de vaporibus, Ex libro de vaporibus. Vincent de Beauvais utilise principalement les Quaestiones Nicolai Peripatetici dans la description d’opĂ©rations sur diverses substances. Étonnamment, les citations des Quaestiones Nicolai Peripatetici sont souvent plus techniques que celles du De anima alchimique et du De aluminibus et salibus : Vincent de Beauvais utilise les parties les plus thĂ©oriques du De anima et du De aluminibus et salibus, mais n’hĂ©site pas Ă  puiser dans les explications thĂ©oriques d’observations pratiques que proposent les Quaestiones Nicolai Peripatetici, ce qui leur donne un aspect plus technique dans le Speculum naturale. Les citations des Quaestiones Nicolai Peripatetici sont toujours assez littĂ©rales, quoique trĂšs sĂ©lectives (par exemple en SN, 7, 94a).

Les Quaestiones Nicolai Peripatetici comme source interne

J’ai pu identifier diffĂ©rentes citations internes non marquĂ©es des Quaestiones Nicolai Peripatetici dans des passages du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham citĂ©s sous le marqueur Liber de natura/is rerum, (cf. p. 28 et infra).

Le Philosophus

Le traité

Le marqueur Philosophus, souvent utilisĂ© par les auteurs mĂ©diĂ©vaux (tant latins qu’arabes) pour dĂ©signer Aristote (voire Avicenne ou AverroĂšs), a en outre un sens plus particulier chez Vincent de Beauvais. On retrouve ce terme pour Ă©voquer proprement Aristote dans le Speculum naturale, souvent avec une prĂ©cision (par exemple en SN, 4, 1c, Philosophus in metheorum libro Io). Mais quand on trouve le marqueur Philosophus seul, il ne dĂ©signe pas seulement Aristote, mais cache Ă©galement d’autres auteurs.

Quand Vincent de Beauvais cite le Philosophus au sujet de l’alchimie, il s’agit :

  1. de citations littĂ©rales du Liber de natura rerum de Thomas de Cantimpré : SN, 7, 24d – SD, 15, 60b1 ; SN, 7, 36c – SD, 15, 60b2 ; SN, 7, 52c – SD, 15, 63b.

  2. de citations littĂ©rales du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham : SN, 7, 41b ; SN, 7, 54c ; ces citations du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham contiennent elles-mĂȘmes des citations qui sont mentionnĂ©es ci-dessous et dans l’annexe I pour les raisons susdites :

  3. deux citations de la version G De aluminibus et salibus, identifiées par Abramov : SN, 7, 41b1 ; SN, 7, 54c1 ;

  4. une citation des Quaestiones Nicolai Peripatetici, non identifiée par Abramov : SN, 7, 41b3 ;

  5. une citation du livre XXXII (Liber fornacis) du Liber de Septuaginta de Geber115, identifiée par Abramov : SN, 7, 54c2 ;

  6. d’une citation du Liber regalis, la Practica, lib. II, c. 46-47 de Hali, c’est-Ă -dire du Kitāb kāmil al-áčŁinā‘a al-áč­abī‘iyya (Livre complet sur l’art mĂ©dical), plus connu sous le titre d’al-MalakÄ« (Le royal) ou Kitāb al-malakÄ« (Livre du royal) de ‘AlÄ« ibn al-‘Abbās al-MajĆ«sÄ«, selon sa traduction par Étienne d’Antioche116 : SN, 7, 75b. Cette citation se retrouve citĂ©e sous le nom Hali117 en SD, 15, 65c.

Il est Ă©tonnant au premier abord d’observer ces extraits sous le marqueur Philosophus, car le Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ©, le Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham et le Liber regalis sont des textes que Vincent de Beauvais utilise par ailleurs, sous les marqueurs Liber de natura/is rerum (cf. ci-dessus p. 28) et Hali. Les citations du Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© et du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham soulignent une proximitĂ© entre le Liber de natura/is rerum et le Philosophus dans le domaine de l’alchimie, mais la citation du Liber regalis montre qu’il s’agit de deux textes distincts. À cela s’ajoute que le nom Philosophus se trouve utilisĂ© comme marqueur dans le manuscrit Oxford, Corpus Christi College, 221 (dĂ©but du XIVe s.) du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham, notamment pour des citations reprises dans le Speculum maius et marquĂ©es Philosophus (dont certaines parmi les citations analysĂ©es).

Si on trouve 94 fois (relevĂ© exhaustif, non plus seulement au sujet de l’alchimie) le Philosophus seul (c’est-Ă -dire sans ajout du type in libro IIIo Metheorum) dans le Speculum naturale, on ne l’observe que 2 fois seul dans le Speculum doctrinale (relevĂ© exhaustif). Ces deux citations du Philosophus dans le Speculum doctrinale, qui se trouvent Ă©galement dans le Speculum naturale, sont des citations littĂ©rales du Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© qui portent sur la description des mĂ©taux (SD, 15, 60b qui correspond Ă  SN, 7, 24d et SN, 7, 36c ; et SN, 7, 52c – SD, 15, 63b). Les autres extraits alchimiques et minĂ©ralogiques du Philosophus, qui ne sont pas du Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ©, sont uniquement citĂ©s dans le Speculum naturale.

La citation SD, 15, 60b prĂ©sente un cas pertinent pour la discussion : SN, 7, 24d – SD, 15, 60b1 est citĂ© sous le marqueur Philosophus dans les deux passages ; et SN, 7, 36c – SD, 15, 60b2 est citĂ© sous le marqueur Liber de natura/is rerum dans le Speculum naturale et sous Philosophus dans le Speculum doctrinale. Le manuscrit du Speculum naturale Paris, BnF, Lat. 14387 confirme le marqueur ex libro de natura rerum, mais le manuscrit du Speculum doctrinale Paris, BnF, Lat. 16100 omet la citation SD, 15, 60a (et non b) ainsi que le marqueur de la citation SD, 15, 60b, en raison d’un saut du mĂȘme au mĂȘme118. Je n’ai donc pas pu vĂ©rifier le marqueur du Speculum doctrinale ailleurs que dans l’édition de Douai119. Toutefois, il ne s’agit probablement pas d’un simple oubli de marqueur, car le Liber de natura/is rerum est citĂ© en SD, 15, 60a, c’est-Ă -dire dans le mĂȘme chapitre 60 : Vincent de Beauvais aurait alors citĂ© dans un seul chapitre le Liber de natura/is rerum, puis le Philosophus, puis Ă  nouveau le Liber de natura/is rerum, ce qu’il ne fait pas habituellement. Pour compliquer encore le tout, le passage SN, 7, 36c – SD, 15, 60b2 comporte lui-mĂȘme une citation du Liber de lumine luminum pseudo-aristotĂ©licien qui est attribuĂ©e Ă  Aristote dans le Liber de natura rerum de Thomas de Cantimpré : le Speculum doctrinale copie fidĂšlement ce marqueur interne, de mĂȘme que le manuscrit du Speculum naturale Paris, BnF, Lat. 14387, mais l’édition de Douai du Speculum naturale note Philosophus au lieu d’Aristoteles comme source interne (cf. annexe).

Aux donnĂ©es prĂ©sentĂ©es ci-dessus s’ajoutent celles recueillies par Eduard Frunzeanu lors de sa thĂšse de doctorat120 : un extrait du Philosophus (SN, 5, 20b) cite un certain Alvredus, qui pourrait ĂȘtre Alfred de Sareshill ; plusieurs extraits du Philosophus sont des citations de la Summa de anima de Jean de La Rochelle et du De anima et potenciis eius d’un maĂźtre Ăšs arts anonyme (c. 1225). Eduard Frunzeanu remarque Ă©galement les citations du Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© et des Quaestiones Nicolai Peripatetici121.

Le Philosophus seul n’est jamais citĂ© dans les huit livres conservĂ©s de la version bifaria.

Ainsi, diffĂ©rentes hypothĂšses se prĂ©sentent. 1) Comme il a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© dit, Vincent de Beauvais ne dĂ©signe que trĂšs rarement ses contemporains par leur nom, le Philosophus pourrait donc ĂȘtre un nom gĂ©nĂ©rique utilisĂ© pour dĂ©signer des ouvrages d’auteurs contemporains Ă  Vincent de Beauvais. 2) Le nom Philosophus pourrait ĂȘtre un marqueur renvoyant Ă  une compilation de diffĂ©rents textes. C’est cette derniĂšre hypothĂšse qui semble la plus vraisemblable, en raison de l’utilisation du marqueur Philosophus dans le manuscrit du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham dont il a Ă©tĂ© question plus haut : le Philosophus serait alors une des sources du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham et de Vincent de Beauvais. Il est peut-ĂȘtre Ă©galement une des sources du Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ©, ou bien le Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© est une des sources de la compilation du Philosophus, ce qui placerait dans ce cas la date de rĂ©daction de cette compilation aprĂšs 1237. La citation du Liber regalis va aussi dans le sens de la deuxiĂšme hypothĂšse. Il est improbable que Vincent de Beauvais cite le Philosophus de maniĂšre indirecte Ă  partir du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham pour les citations qui s’y retrouvent, car le Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© ne comporte jamais le marqueur Philosophus.

Le fait que Vincent de Beauvais ne cite le Philosophus seul que 2 fois dans le Speculum doctrinale contre 94 dans le Speculum naturale, Ă  l’instar des Quaestiones Nicolai Peripatetici qui ne sont citĂ©es que dans le Speculum naturale, n’est pas anodin, mais reste difficile Ă  interprĂ©ter.

L’utilisation par Vincent de Beauvais

Au sujet de l’alchimie, le Philosophus est cité 7 fois (5 dans le SN, et 2 dans le SD), sous l’unique marqueur Philosophus. Tous les extraits du Speculum naturale sont dans le livre VII, et ceux du Speculum doctrinale dans le livre XV (et non dans le livre XI), dans les chapitres consacrĂ©s aux mĂ©taux. Comme il a Ă©tĂ© dit, les deux extraits du Speculum doctrinale sont des citations littĂ©rales du Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ©. Le Philosophus est principalement utilisĂ© par Vincent de Beauvais pour des descriptions minĂ©ralogiques, mais aussi pour la description des opĂ©rations alchimiques sur le fer (SN, 5, 54c).

Au sujet des citations du Philosophus qui sont des extraits du Liber de natura rerum de Thomas de Cantimpré et du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham, le traitement est identique à celles placées sous le marqueur Liber de natura/is rerum (cf. ci-dessus p. 28).

Les citations de l’Actor

Les citations analysĂ©es ne permettent pas d’apporter de nouveaux Ă©lĂ©ments Ă  la question de la paternitĂ© des citations de l’Actor, je me contente donc de renvoyer le lecteur aux Ă©tudes consacrĂ©es Ă  ce sujet122. Ces citations sont le plus souvent considĂ©rĂ©es comme des passages rĂ©digĂ©s par Vincent de Beauvais, mais la question reste ouverte. L’Actor intervient 12 fois concernant l’alchimie (5 dans le SN, 7 dans le SD). Deux citations sont reprises Ă  la fois dans le Speculum naturale et le Speculum doctrinale (SN, 7, 84a – SD, 11, 131a, et SN, 7, 85a – SD, 11, 106a).

En plusieurs passages, l’Actor donne des prĂ©cisions sur la structure de l’ouvrage (en SN, 7, 6c ; SD, 15, 65a ; et SN, 15, 65d).

Dans certaines citations, l’Actor reprend des passages dĂ©jĂ  citĂ©s ou rĂ©sume des extraits plus longs. Ainsi, en SN, 7, 63b, il met en perspective l’extrait des MĂ©tĂ©orologiques d’Aristote citĂ© en SN, 7, 63a avec une phrase du De aluminibus et salibus qu’il donne alors partiellement et qui se trouve Ă©galement en SN, 7, 62a – SD, 11, 119b. En SN, 7, 67b, il reprend un passage de la Doctrina alchimiae/ Alchimista citĂ© en SN, 7, 60b1 – SD, 11, 105d1 aprĂšs avoir proposĂ© une conclusion tirĂ©e des chapitres 63, 66 et 67 sur le vif-argent et le soufre (le vif-argent et le soufre sont la base des mĂ©taux). Dans la citation SN, 7, 84a – SD, 11, 131a, il rĂ©sume les chapitres SN, 81-83 et SD, 129-130. Il faut prĂ©ciser que cette citation est marquĂ©e glossa dans le Speculum naturale et non Actor, mais la raison semble ĂȘtre que la citation du Speculum naturale suit directement la glossa de l’Epistola ad Hasen regem de re tecta dont il Ă©tĂ© question plus haut (cf. ci-dessus p. 20) : le marqueur aura Ă©tĂ© confondu.

La citation SN, 7, 85a – SD, 11, 106a a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© traitĂ©e plus haut, au sujet du livre IV des MĂ©tĂ©orologiques (cf. ci-dessus 22).

Enfin, la citation SD, 11, 105a contient un passage dans lequel l’Actor se positionne sur la place de l’alchimie dans la classification des sciences, en citant Richard de Saint Victor. Cette citation a Ă©tĂ© Ă©tudiĂ©e par Jean-Marc Mandosio123.

Conclusion

Outre la classification des sources alchimiques de Vincent de Beauvais proposĂ©e dans ce dossier, Ă  savoir une distinction entre les traitĂ©s purement alchimiques et les ouvrages plus gĂ©nĂ©raux, on peut diviser les textes collectĂ©s par le dominicain en deux autres catĂ©gories : les grandes autoritĂ©s, et les ouvrages rĂ©cents de son Ă©poque. Comme pour les autres domaines, il ne se contente jamais d’évoquer les grands noms reconnus, il se soucie Ă©galement de prĂ©senter les derniers Ă©tats du savoir : l’usage constant du Liber de natura rerum de Thomas de CantimprĂ© et du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham en est un bon exemple. Et comme dans toute encyclopĂ©die, l’auteur s’attache aux grandes idĂ©es de son temps, en l’occurrence, la thĂ©orie du soufre et du mercure et d’autres de ce genre. Cependant, cette constatation ne doit pas induire une fausse opinion concernant Vincent de Beauvais et son rapport Ă  l’alchimie. Ses extraits composent un exposĂ© sur l’alchimie, non pas l’exposĂ© d’un alchimiste ; le dominicain est Ă©tranger aux pratiques, non seulement alchimiques, mais Ă©galement mĂ©tallurgiques. On ne devient pas alchimiste en lisant le Speculum maius, et lĂ  n’est pas l’intention de l’encyclopĂ©diste ; il tend plutĂŽt Ă  prĂ©senter l’alchimie Ă  des frĂšres Ă©rudits qu’à faire d’eux des adeptes de l’art transmutatoire. Des erreurs de cohĂ©rence s’observent, Ă©ventuellement dues Ă  un manque de connaissance ou Ă  un manque d’attention, voire peut-ĂȘtre voulues par souci de littĂ©ralité : le sel ammoniac, par exemple, est classĂ© par le dominicain parmi les esprits (les substances qui se subliment d’elles-mĂȘmes, ou plutĂŽt par la simple action de la chaleur) quand il cite le De anima pseudo-avicennien ou la Doctrina alchimiae, mais se trouve considĂ©rĂ© comme un sel quand c’est le De aluminibus et salibus qui est repris124. Vincent de Beauvais n’utilise que peu de traitĂ©s d’alchimie. Il a vraisemblablement lu les textes qu’il a trouvĂ©s et les a citĂ©s sans trop se soucier de la prĂ©cision et de la vĂ©racitĂ© de leur contenu. Cette tendance se marque Ă©galement, comme dans les autres encyclopĂ©dies de l’époque, par une prĂ©sence immodĂ©rĂ©e de la thĂ©orie, et une absence quasi totale de rĂ©fĂ©rences pratiques. Jamais l’auteur ne cite une recette, jamais il ne dĂ©crit une manipulation technique. Et mĂȘme quand il aborde une question plus pratique, c’est toujours selon une vision thĂ©orique, pour expliquer un phĂ©nomĂšne, et non pour enseigner comment le rĂ©aliser. Cette omniprĂ©sence de la thĂ©orie constitue le paradoxe de Vincent de Beauvais. Dans sa classification des sciences, il range en effet l’alchimie parmi les arts mĂ©caniques, c’est-Ă -dire les arts dont la thĂ©orie, s’il y en a une, est extĂ©rieure Ă  eux-mĂȘmes et participe de la philosophie plutĂŽt que de l’art mĂ©canique lui-mĂȘme, comme le dĂ©crit Richard de Saint-Victor en SD, 11, 1a :

« Il faut savoir Ă©galement que la mĂ©canique participe de la philosophie selon sa thĂ©orie, et non selon son exĂ©cution. Par exemple, la thĂ©orie (dans le domaine) de l’agriculture relĂšve du philosophe, son exĂ©cution du paysan. »125

Mais bien qu’il affirme cela, Vincent de Beauvais ne prĂ©sente dans son discours sur l’alchimie que des notions thĂ©oriques, c’est-Ă -dire, suivant le raisonnement de Richard de Saint-Victor, des notions qui relĂšvent de la philosophie et non de l’alchimie.

Si la minĂ©ralogie prĂ©sentĂ©e dans le Speculum maius est un mĂ©lange entre les donnĂ©es classiques grecques et latines (Pline, Isidore, Aristote) et les nouveautĂ©s arabo-musulmanes (De aluminibus et salibus, De anima, etc.), l’alchimie qu’il dĂ©crit est quant Ă  elle une science rĂ©cente dans le monde occidental, intĂ©gralement issue des premiĂšres traductions de l’arabe, une alchimie encore pleinement influencĂ©e par les traitĂ©s arabo-musulmans. Le temps de l’alchimie latine Ă  part entiĂšre n’est pas encore arrivĂ©, avec ses compositions propres et ses auteurs plus indĂ©pendants vis-Ă -vis des thĂ©ories des alchimistes arabo-musulmans, bien que toujours soumis Ă  leur autoritĂ© (dont l’exemple le plus influent est la Summa perfectionis du pseudo-Geber). C’est ainsi Ă  une alchimie avant tout jābirienne que Vincent de Beauvais fait allusion : les principes transmutatoires dĂ©crits dans son Ɠuvre sont basĂ©s sur la thĂ©orie des Ă©lixirs. Toute chose est composĂ©e des quatre Ă©lĂ©ments, eux-mĂȘmes caractĂ©risĂ©s par les propriĂ©tĂ©s Ă©lĂ©mentaires ; toute chose est ainsi dĂ©finie par une proportion de propriĂ©tĂ©s Ă©lĂ©mentaires. Pour opĂ©rer une transmutation, l’alchimiste doit changer cette proportion pour lui donner celle de l’or ou de l’argent. Pour ce faire, il utilise les Ă©lixirs : il divise une substance appelĂ©e pierre en ses quatre Ă©lĂ©ments, et prĂ©pare ces Ă©lĂ©ments de maniĂšre Ă  ce qu’ils ne soient caractĂ©risĂ©s que par une des propriĂ©tĂ©s Ă©lĂ©mentaires ; il rĂ©alise ensuite un mĂ©lange prĂ©cis de propriĂ©tĂ©s Ă©lĂ©mentaires, appelĂ© Ă©lixir, qu’il projette sur le mĂ©tal pour en changer la proportion de propriĂ©tĂ©s. A cela s’ajoute parfois un ferment, c’est-Ă -dire une petite quantitĂ© prĂ©parĂ©e du mĂ©tal dĂ©sirĂ©, or ou argent, qui agit Ă  la maniĂšre d’un levain en transformant le mĂ©tal vil en mĂ©tal noble126. Ces Ă©lixirs peuvent ĂȘtre faits avec diverses matiĂšres, au sujet desquelles les alchimistes concordent rarement. De cette doctrine arabe ne transparaĂźt qu’un exposĂ© tronquĂ© chez Vincent de Beauvais : les quelques chapitres consacrĂ©s Ă  la transmutation (SN, 7, 81-86 et 89-93, et SD, 11, 124-130), presque intĂ©gralement tirĂ©s du De anima et de l’Alchimista, ne prĂ©sentent pas la doctrine complĂšte, mais mentionnent seulement la division en les quatre Ă©lĂ©ments. En outre, la citation de l’Alchimista en SN, 7, 81a – SD, 11, 124a amĂšne une confusion entre la pierre et l’élixir. Ainsi, il n’est pas possible sur la base seule du Speculum maius de comprendre vĂ©ritablement l’alchimie Ă  laquelle Vincent de Beauvais fait allusion.

Je termine cette Ă©tude par une constatation adventice, qui aurait plus sa place dans un essai que dans un article scientifique. L’observation des mĂ©thodes de Vincent de Beauvais et des erreurs de cohĂ©rence dans son ouvrage m’a portĂ© Ă  constater une proximitĂ© entre le mouvement des encyclopĂ©distes du XIIIe siĂšcle et le mouvement actuel d’expansion dĂ©bridĂ©e de l’informatique et de l’Internet. L’accĂšs Ă  l’information Ă©tant devenu encore plus aisĂ© qu’auparavant, on observe en effet, en particulier auprĂšs des Ă©tudiants universitaires (nĂ©s avec cette facilitĂ© d’accĂšs Ă  l’information), une propension certaine Ă  la juxtaposition d’informations : de nombreux travaux sont souvent une succession d’extraits plus ou moins remaniĂ©s, gĂ©nĂ©ralement tirĂ©s d’ouvrages Ă  disposition sur le site de Googlebooks, parfois sans aucune considĂ©ration pour le contexte initial des informations, voire sans souci d’homogĂ©nĂ©itĂ©. L’analyse prend ainsi de plus en plus de place, et la synthĂšse s’efface, rompant l’équilibre entre ces deux facultĂ©s qui est pourtant un des buts les plus importants, sinon le but le plus important des Ă©tudes universitaires. Ce systĂšme m’apparaĂźt en plusieurs points similaire Ă  ce que l’on observe dans la dĂ©marche des encyclopĂ©distes du XIIIe siĂšcle : Vincent de Beauvais met en parallĂšle des extraits de texte en les sortant de tout contexte, et propose ainsi des informations brutes, sans donner au lecteur les Ă©lĂ©ments suffisants pour les comprendre pleinement. Faciliter l’accĂšs Ă  l’information brute est au centre de leur entreprise. Mais la comparaison s’arrĂȘte Ă  cette caractĂ©ristique formelle : les causes, les motivations, les buts et les mĂ©thodes mĂȘme sont diffĂ©rents. Outre la mise Ă  disposition d’informations, le but des encyclopĂ©distes mĂ©diĂ©vaux est de mettre en perspective les anciens savoirs en prĂ©sentant Ă©galement les nouveautĂ©s, de rĂ©colter les dires des plus grandes autoritĂ©s sur tous les sujets pour offrir au lecteur un savoir total ; le souci de cohĂ©rence n’a sa place que dans l’organisation gĂ©nĂ©rale de l’ouvrage, sans oublier l’ampleur de la tĂąche.

Annexe en pdf (pp 42-118)

 

Notes: 

1 Cet article est le rĂ©sultat de recherches menĂ©es lors d’un post-doc Ă  l’Atelier Vincent de Beauvais du Centre de MĂ©diĂ©vistique Jean-Schneider (ERL 7229) de l’UniversitĂ© de Lorraine en 2010-2011, et rĂ©digĂ©es lors d’un post-doc Ă  l’UniversitĂ© catholique de Louvain (depuis 2011). Je remercie avant tout Isabelle Draelants et Eduard Frunzeanu : plusieurs conclusions prĂ©sentĂ©es dans cet article sont le fruit de discussions avec eux. La composition et la rĂ©daction de ce dossier n’auraient pas Ă©tĂ© possibles sans eux. Je remercie Ă©galement Catherine Arbuthnott, Charlotte Bodart, CĂ©cile Bonmariage, AndrĂ©e Colinet, Marie-Christine Duchenne, Ilse De Vos et Jan Keymeulen pour leur aide prĂ©cieuse. J’adresse aussi des remerciements Ă  Jean-Marc Mandosio et Baudouin Van den Abeele pour leur relecture attentive et leurs suggestions pertinentes. Enfin, toute ma gratitude va Ă  Vincent de Beauvais lui-mĂȘme, entre autres pour s’ĂȘtre intĂ©ressĂ© Ă  l’alchimie et avoir indiquĂ© ses sources sans trop d’obscuritĂ©.

2 1144 est une date indicative pour l’amorce du mouvement de traductions de textes alchimiques. Pour plus d’informations, cf. Robert Halleux, « La rĂ©ception de l’alchimie arabe en Occident », in Histoire des sciences arabes, III : Technologie, alchimie et sciences de la vie, Roshdi Rashed (dir.), Paris, 1997, p. 143-154 (ici, p. 143-146).

3 Cf. ci-dessous p. 3.

4 Cf. ci-dessous, l’état de la question.

5 Je mets en outre Ă  disposition une base de donnĂ©es synoptique des extraits du Speculum naturale et du Speculum doctrinale correspondants, Ă  titre informatif, qui pourra ĂȘtre utile d’ici Ă  la mise en ligne de la base de donnĂ©es Sourcencyme : http://medievistique.univ-nancy2.fr/contentId%3D9213.Il s’agit d’un outil utilisĂ© pendant l’élaboration de cette Ă©tude, et non de rĂ©sultats dĂ©finitifs tels que cet article et son annexe.

6 Il contient de grandes encyclopĂ©dies mĂ©diĂ©vales intĂ©gralement saisies et enregistrĂ©es, et permet aux spĂ©cialistes d’introduire les identifications des citations au fur et Ă  mesure de leur travail. La mise en ligne est prĂ©vue en 2013. Sourcencyme a Ă©tĂ© financĂ© lors d’une premiĂšre phase par l’Agence nationale pour la recherche, de 2007 Ă  2011. Le dossier des identifications des sources alchimiques, rĂ©alisĂ© par mes soins, est le fondement de cette Ă©tude. Cf. http://medievistique.univ-nancy2.fr/contentId%3D6819. Cf. Isabelle Draelants, avec la collaboration d’Emmanuelle Kuhry, « Les sources mises en ligne par des mĂ©diĂ©vistes Ă  l’UniversitĂ© de Nancy. En particulier, le programme “Sourcencyme” de corpus annotĂ© des textes encyclopĂ©diques latins et de leurs sources », in Actes de la JournĂ©e d’étude ‘Digital Edition of Sources in Europe: Achievements, (juridical and technical) Problems and Prospects’, organisĂ©e aux Archives gĂ©nĂ©rales du Royaume Ă  l’occasion des 175 ans de la Commission Royale d’Histoire, Th. De Hemptinne, J. L. De Paepe (dir.), Bruxelles, 2010 (Bulletin de la Commission royale d’Histoire), p. 121-150. Disponible en ligne : http://www.crhistoire.be/portaHistoricaDoc/draelants.pdf.

7 Je ne m’attarde pas sur les mĂ©thodes de travail de Vincent de Beauvais et sur les informations connues sur les socii qui l’entouraient. J’utilise le nom gĂ©nĂ©rique de Vincent de Beauvais pour dĂ©signer toute l’équipe qui travaillait avec lui. Cf. Isabelle Draelants, Monique Paulmier-Foucart, « Échanges dans la societas des naturalistes au milieu du XIIIe siĂšcle : Arnold de Saxe, Vincent de Beauvais et Albert le Grand », in Par les mots et les textes, MĂ©langes de langue, de littĂ©rature et d’Histoire des sciences mĂ©diĂ©vales offerts Ă  Claude Thomasset, DaniĂšle James-Raoul, Olivier Soutet (dir.), Paris, 2005, p. 219-238.

8 Marcellin Berthelot, Histoire des sciences. La chimie au Moyen Âge, avec la collaboration de O. Houdas pour les textes arabes, Paris, 1893, 3 t. (ici, t. 1, p. 280-289).

9 Pauline Aiken, « Vincent of Beauvais and Chaucer’s Knowledge of Alchemy », in Studies in Philology, 41, 1944, p. 371-389.

10 Chiara Crisciani, « I Domenicani e la tradizione alchemica nel duecento », in Atti del Congresso Internazionale, n°2, S. Tommaso nella Storia del Pensiero, no 2, Napoli, 1976, p. 35-42 (ici, p. 37-38). Cf. également l’article de F. Sherwood Taylor, « Presidential Address: The Theory of Metals in the Works of the 13th-Century Encyclopaedists », in Bulletin of the British Society for the History of Science, 1, 1952, p. 195-204, dont Vincent de Beauvais est hĂ©las presque absent.

11 Jean-Marc Mandosio, « La place de l’alchimie dans les classifications des sciences et des arts Ă  la Renaissance », in Chrysopoeia, 4, 1990-1991, p. 199-282 (ici, p. 200-206), et la version abrĂ©gĂ©e de l’article, Id., « L’alchimie dans les classifications des sciences et des arts Ă  la Renaissance », in Alchimie et philosophie Ă  la Renaissance. Actes du colloque international de Tours, 1991, Jean-Claude Margolin et Sylvain Matton (dir.), Paris, 1993, p. 11-41.

12 Barbara Obrist, « Art et nature dans l’alchimie mĂ©diĂ©vale », in Revue d’histoire des sciences, 49, 1996, p. 215-286 (ici, p. 224).

13 Cette conception n’est pas la plus rĂ©pandue au XIIIe siĂšcle, cf. Obrist, Art et nature..., p. 224.

14 William R. Newman, The Summa perfectionis of Pseudo-Geber, A critical edition, translation and study, Leiden, p. 15-25.

15 Marie-Claude DĂ©prez-Masson, « L’alchimie dans les encyclopĂ©dies du XIIIe siĂšcle : Vincent de Beauvais et ses confrĂšres », in EncyclopĂ©dies mĂ©diĂ©vales, discours et savoirs, B. Baillaud, J. de Gramont et D. HĂŒe (dir.), Rennes, 1998, p. 117-142, en particulier les p. 131-142 consacrĂ©es Ă  Vincent de Beauvais.

16 Sylvain Matton, Philosophie et Alchimie à la Renaissance et à l’Âge classique. I. Scolastique et Alchimie (XVIe-XVIIe siùcles), Paris, 2009, (Textes et Travaux de Chrysopoeia, 10).

17 Jean-Marc Mandosio, « L’acier dans la minĂ©ralogie et l’alchimie mĂ©diĂ©vales », in L’acier en Europe avant Bessemer, P. Dillmann, L. PĂ©rez et C. Verna (Ă©d.), Toulouse, 2011, p. 95-109, en particulier p. 97-100.

18 Serge Lusignan, Le Speculum doctrinale, livre III : Ă©tude de la logique dans le miroir des sciences de Vincent de Beauvais, thĂšse de doctorat, MontrĂ©al, UniversitĂ© de MontrĂ©al, 1971 ; Stefan Schuler, « Medicina secunda philosophia. Die Einordnung der Medizin als Hauptdisziplin und die Gruppierung ihrer Quellen in Speculum maius des Vinzenz von Beauvais », in FrĂŒhmittelalterliche Studien, 33, 1999, p. 169-251 ; et Mario Cardinale, « Diritto canonico e diritto romano nella struttura dello Speculum doctrinale di Vincent de Beauvais (Premesse a una edizione critica) », in Apollinaris, 63, 1990, p. 681-727.

19 Pour plus de dĂ©tails sur le livre V de la version bifaria, cf. le site de l’Atelier Vincent de Beauvais, page http://medievistique.univ-nancy2.fr/contentId%3D7973. Pour plus d’informations sur la version bifaria, cf. la page http://medievistique.univ-nancy2.fr/contentId%3D7961.

20 Le livre VIII est consacré aux pierres.

21 Dicto de terre natura et eius fecunditate atque cultura, de ipsius quoque passionibus atque vaporibus, restat dicendum de quibusdam terrenis corporibus partim in visceribus terre, partim in eius superficie apparentibus, videlicet de mineralibus et marinis coloribus {nativis coloribus Paris, BnF Lat. 14387} atque lapidibus. Hec etenim a libro superiori, ob vitandum prolixitatis fastidium, rescindentes, in sequentibus prosequenda diffusius reservavimus. Nunc igitur a corporibus mineralibus exordium capiamus.

22 Le livre est intitulé : Liber undecimus agit de artibus mechanicis, videlicet de lanificio, de architectura, de arte fabrili, de armatura quoque et arte militari, de arte theatrica, de navigatione et mercatura, de venatione et agricultura et alchimia. Et habet CXXXIII capitula.

23 La matiĂšre minĂ©ralogique du Speculum maius est abordĂ©e dans I. Draelants, « La science encyclopĂ©dique des pierres au 13e siĂšcle : l’apogĂ©e d’une veine minĂ©ralogique », in Aux origines de la gĂ©ologie de l’AntiquitĂ© au Moyen Âge. Actes du colloque international 10-12 mars 2005, Paris Sorbonne (Paris IV), Cl. Thomasset, J. Ducos et J.-P. Chambon (dir.), Paris, 2010, p. 91-139.

24 Cf. ci-dessous p. 27.

25 L’explication dĂ©taillĂ©e du systĂšme d’abrĂ©viation et de rĂ©fĂ©rencement se trouve au dĂ©but de l’annexe I.

26 Cf. n.6.

27 On trouvera la liste complĂšte de ces citations dans l’annexe, ainsi que leur texte complet avec identification et comparaison entre le Speculum naturale et le Speculum doctrinale. Pour plus de dĂ©tails sur les citations relatives Ă  la philosophie de la nature chez Vincent de Beauvais, cf. Isabelle Draelants, « La science naturelle et ses sources chez BarthĂ©lemy l’Anglais et les encyclopĂ©distes contemporains », in Bartholomaeus Anglicus, De proprietatibus rerum. Texte latin et rĂ©ception vernaculaire. Lateinischer Text und volkssprachige Rezeption, Baudouin Van den Abeele et Heinz Meyer (dir.), Turnhout, 2005 (De diversis artibus, Coll. de travaux de l’AcadĂ©mie internationale d’Histoire des sciences, t. 74, N.S. 37), p. 43-99.

28 Le terme « marqueur » doit ĂȘtre pris dans le sens technique prĂ©cis : il s’agit de l’auteur ou du traitĂ© auquel Vincent de Beauvais attribue un texte, c’est-Ă -dire la source telle qu’elle est rĂ©fĂ©rencĂ©e au sein du Speculum maius.

29 A moins d’une coquille dans l’édition de Douai ou d’une erreur Ă©vidente dans la tradition manuscrite, que je corrige dans ce cas (par exemple la disparition d’un marqueur qui a pour consĂ©quence que la citation est attribuĂ©e au marqueur prĂ©cĂ©dent).

30 Le programme, en open source, est disponible sur le site https://sourceforge.net/projects/textcomparer/. La thĂšse de doctorat est la suivante : Ilse De Vos, Good counsel never comes amiss. Nilus Doxapatres and the De oeconomia Dei: Critical edition of book I, chapters 164-263, thĂšse de doctorat, Katholieke Universiteit Leuven, 2010, publication Ă  venir dans le Corpus Christianorum Series Graeca. Cf. également Andrea Ernst-Gerlach, Gregory Crane, « Identifying Quotations in Reference Works and Primary Materials », in Proceedings of the 12th European conference on Research and Advanced Technology for Digital Libraries, Heidelberg, 2008, p. 78-87. Disponible en ligne Ă  l’adresse http://www.is.informatik.uni-duisburg.de/bib/pdf/ir/Ernst_Crane:08.pdf.

31 Les outils de reconnaissance automatique de caractĂšres permettent toutefois de faciliter la tĂąche dans la plupart des cas. On imagine cependant les possibilitĂ©s d’un tel programme d’identification automatique s’il Ă©tait combinĂ© Ă  des bases de donnĂ©es telles que celles du Thesaurus Linguae Graecae ou de Googlebooks, pour ne citer que les plus importantes.

32 Il s’agit des passages SN, 7, 36d – SD, 11, 133a2 ; SN, 7, 60b1 – SD, 11, 105d1 ; SN, 7, 60b2 – SD, 11, 117b ; SN, 7, 60b3 – SD, 11, 105d3 ; SN, 7, 73a – SD, 11, 105d2.

33 Sed dicuntur improprie aduri, quoniam aduruntur sine denigratione et combustione.

34 Charles Burnett, « The Coherence of the Arabic-Latin Translation Program in Toledo in the Twelfth Century », in Science in Context, 14, 2001, p. 249-288 (ici, p. 280, n° 63). J’utilise l’édition de Venise 1507.

35 Cf. cependant l’annexe, car le texte citĂ© ne se trouve pas dans le texte arabe tel qu’il nous est parvenu.

36 SignalĂ©e de la sorte dans le Speculum naturale : Unde docet Avicenna in capitulo de complexionibus membrorum distillare ossa et capillos, ad sciendum in quo eorum plus humiditatis. Le chapitre se trouve en Avicenne, Liber canonis, trad. de GĂ©rard de CrĂ©mone, lib. 1, fen 1, doc. 3, c. 2 (De complexionibus membrorum), dans l’édition Liber canonis Avicenne revisus et ab omni errore mendaque purgatus summaque cum diligentia impressus, rĂ©impr. Hildesheim, 1998 (Ă©d. de Venise, 1507), p. 3r-v.

37 Signalées dans le texte par les marqueurs de citations (Speculum naturale) : Dicit autem princeps aboali, scilicet Avicenna et princeps quidem dicit in epistola ad Arsem.

38 SignalĂ©e dans le texte par l’expression (Speculum naturale) : Nam in libro de LXX dicitur.

39 Cf. n. 15.

40 Le Kitāb al-Sab‘īn (Livre des LXX) est attribuĂ© Ă  l’alchimiste Jābir ibn កayyān. Dans la liste des traductions de GĂ©rard Ă©tablie par ses socii, on lit « Liber divinitatis de LXX » (Burnett, « The Coherence of the Arabic-Latin Translation Program... », p. 280, n° 65) : le Livre de la divinitĂ© (Kitāb al-lāhĆ«t) est le premier livre du Livre des LXX. On peut supposer que GĂ©rard a en rĂ©alitĂ© traduit une plus grande partie du Livre des LXX, comme semble le montrer entre autres l’incipit du ms. Paris, BnF, lat. 7156, f. 66v « Liber de septuaginta translatus a magistro Renaldo Cremonensi de lapide animali », que cite Berthelot au dĂ©but de son Ă©dition du Liber de LXX dans Marcellin Berthelot, « ArchĂ©ologie et histoire des sciences », in MĂ©moires de l’AcadĂ©mie des Sciences de l’Institut de France, 49, 1906, p. 310-363 (ici p. 310).

41 SignalĂ©e dans le texte par l’expression (Speculum naturale) : ut dicit Constantinus in libro graduum, ubi agit de arsenico, id est auripigmento. Au sujet de Constantin l’Africain, cf. Constantine the African and Ê»AlÄ« Ibn Al-Ê»Abbās Al-MaÄŸĆ«sÄ«: The Pantegni and Related Texts, Charles Burnett et Danielle Jacquart (dir.), Leiden, 1995.

42 Aphorisme 9 dans Yƫងannā Ibn Māsawayh (Jean Mesue), Le livre des axiomes médicaux (Aphorismi), éd. du texte arabe et des versions latines avec trad. française et lexique par Danielle Jacquart et Gérard Troupeau, GenÚve, 1980, p. 119. Je remercie Eduard Frunzeanu pour son aide dans cette identification.

43 L’édition critique, la traduction française et le commentaire du De anima alchimique Ă©taient le sujet de ma thĂšse de doctorat : SĂ©bastien Moureau, Le De anima in arte alchemiae du pseudo-Avicenne. Edition critique, traduction et Ă©tude, thĂšse de doctorat, Louvain-la-Neuve, UniversitĂ© catholique de Louvain, Institut orientaliste, 2010, bientĂŽt publiĂ©e. Le titre De anima in arte alchemiae ne se trouve que dans l’édition de 1572 de Mino Celsi (cf. n. 15), les manuscrits intitulant le traitĂ© Liber de anima ou De anima. Dans cet article, les citations du De anima sont extraites de mon Ă©dition critique, mais la pagination est celle de l’édition de Celsi. Pour des Ă©tudes plus anciennes sur le De anima, cf. Berthelot, Histoire des sciences..., t. 1, p. 293-305 ; Moritz Steinschneider, « Zur alchimistischen Literatur der Araber », in Zeitschrift der Deutschen MorgenlĂ€ndischen Gesellschaft, 58, 1904, p. 299-315 (pour Avicenne, p. 309-315), disponible sur le site http://www.dmg-web.de/?page=6 ; M. Steinschneider, « Die europĂ€ischen Übersetzungen aus dem Arabischen bis Mitte des 17. Jahrhunderts », Vienne, 1904-1905, (Sitzungsberichte der Akademie der Wissenschaften in Wien, 149 et 151), § 143 ; Julius Ruska, « Die Alchemie des Avicenna », in Isis, 21, 1934, p. 13-51 ; J. Ruska, « Zum Avicennatext des Cod. Vadianus 300 », in Sudhoffs Archiv, 27, 1934, p. 499-510 ; Georges C. Anawati, « Avicenne et l’alchimie », in Oriente e Occidente nel Medioevo : filosofia e scienze, Convegno internazionale 9-15 aprile 1969, Roma, 1971, p. 285-341 (ici p. 286-288) ; Manfred Ullmann, Die Natur- und Geheimwissenschaften im Islam, Leiden, 1972, (Handbuch der Orientalistik, erste Abteilung, ErgĂ€nzungsband VI zweiter Abschnitt), p. 222-224 ; G. C. Anawati, « L’alchimie arabe », in Histoire des sciences arabes, III : Technologie, alchimie et sciences de la vie, Roshdi Rashed (dir.), Paris, 1997, p. 111-141 (ici p. 134-135) ; S. Moureau, « Some Considerations Concerning the Alchemy of the De anima in arte alchemiae of Pseudo-Avicenna », in Ambix, 56, 2009, p. 49-56 ; S. Moureau, « Questions of Methodology about Pseudo-Avicenna’s De anima in arte alchemiae : Identification of a Latin Translation and Method of Edition », in Chymia: Science and Nature in Early Modern Science (1450-1750), Miguel LĂłpez-PĂ©rez et Didier Kahn (dir.), Newcastle, 2010, p. 1-19 ; S. Moureau, « Ratio et sensus : les sens au service de l’acquisition des connaissances dans le De anima in arte alchemiae du pseudo-Avicenne », in Expertus sum : L’expĂ©rience par les sens en philosophie naturelle mĂ©diĂ©vale, Thomas BĂ©natouĂŻl et Isabelle Draelants (dir.), Firenze, 2011, (Micrologus’ Library, 40), p. 269-288. À cela s’ajoutent deux articles Ă  paraĂźtre : S. Moureau, « The Porta elementorum of Pseudo-Avicenna’s alchemical De anima and Marius’ De elementis : two Latin versions of the same Arabic treatise », et S. Moureau, « Elixir atque fermentum. New investigations about the link between Pseudo-Avicenna’s alchemical De anima and Roger Bacon : alchemical and medical doctrines ».

44 La date de traduction est donnĂ©e dans le colophon de deux manuscrits : Bernkastel-Kues, Bibliothek im St. Nikolaus Hospital, Cusanus 299, f. 49v ; MontrĂ©al, McGill University, Osler 480, f. 225r (et dans l’édition de Celsi, p. 468, dont ce manuscrit est le modĂšle).

45 Alginz, transcription de al-jins (genre), De anima, p. 10.

46 Cette hypothĂšse d’un original arabe identique pour le De elementis de Marius et la Porta elementorum est dĂ©fendue dans un article Ă  paraĂźtre, avec le dĂ©tail de la discussion sur le sujet : Moureau, « The Porta elementorum... ». Pour de plus anciens travaux sur le De elementis de Marius, cf. entre autres Richard C. Dales, Marius: ‘On the Elements’. A critical edition and translation, Berkeley, 1976 ; et Charles Burnett, « Physics before the Physics : early translations from Arabic of texts concerning nature in MSS British Library, Additional 22719 and Cotton Galba E IV », in Medioevo. Rivista di storia della filosofia medievale, 27, 2002, p. 53-109.

47 Pour une analyse historique et philologique de la deuxiÚme partie du De anima, cf. Moureau, Le De anima in arte alchemiae..., vol. 1, partie 1, p. 26-30.

48 Pour l’analyse historique et philologique de la troisiùme partie du De anima, cf. Moureau, Le De anima in arte alchemiae..., vol. 1, partie 1, p. 30-31.

49 La discussion concernant l’attribution est basĂ©e sur des arguments qui sont discutĂ©s plus amplement dans Moureau, Le De anima in arte alchemiae..., vol. 1, partie 1, p. 16-53. Les arguments peuvent ĂȘtre rĂ©sumĂ©s de la sorte : 1) La premiĂšre partie du De anima ne contient aucune mention d’Avicenne, contrairement au reste de l’ouvrage qui foisonne d’expressions du type « dixit Abuali Abincine » ; 2) Le lieu et la date de composition de la deuxiĂšme partie invalident l’attribution. À cela s’ajoute qu’Avicenne nie la possibilitĂ© de la transmutation des espĂšces, argumentant que l’art ne peut changer la forme spĂ©cifique d’une chose, dans une section du Kitāb al-Shifā’ (cf. Avicenne, Al-Shifā’. Al-áčŹabī‘iyyāt. 5, Al-ma‘ādin wa al-āthār al-‘ulwiyya (La physique. 5, Les mĂ©taux et la mĂ©tĂ©orologie), Ă©d. par ‘Abd el-កalÄ«m MontaáčŁar, Sa‘īd Zāyed et ‘Abdallāh Ismā‘īl, Le Caire, Organisation gĂ©nĂ©rale des imprimeries gouvernementales, 1964, p. 21-22), alors que la deuxiĂšme partie du De anima considĂšre la transmutation des espĂšces comme possible pour l’homme ; 3) La troisiĂšme partie du traitĂ© porte spĂ©cifiquement sur la fabrication d’élixir pour la transmutation, dont Avicenne nie la possibilité ; et les phrases d’introduction du type « dixit Abuali Abincine » diffĂšrent et semblent ĂȘtre des interpolations plus tardives. La troisiĂšme partie semble avoir Ă©tĂ© ajoutĂ©e Ă  l’ouvrage pour complĂ©ter la fin manquante de la deuxiĂšme partie.

50 Au sujet de Jābir ibn កayyān et des traitĂ©s alchimiques qui lui sont attribuĂ©s, cf. Paul Kraus, Jābir ibn កayyān, contribution Ă  l’histoire des idĂ©es scientifiques dans l’Islam. Volume II, Jābir et la science grecque, Le Caire, 1942, (MĂ©moires prĂ©sentĂ©s Ă  l’Institut d’Egypte, t. 45) ; Paul Kraus, Jābir ibn កayyān, contribution Ă  l’histoire des idĂ©es scientifiques dans l’Islam. Volume I, Le corpus des Ă©crits Jābiriens, Le Caire, 1943, (MĂ©moires prĂ©sentĂ©s Ă  l’Institut d’Egypte, t. 44) ; Syed Nomanul Haq, Names, natures and things, The Alchemist Jābir ibn កayyān and his Kitāb al-Aáž„jār, with a foreword by David E. Pingree, Dordrecht, 1994.

51 L = Oxford, Bodleian Library, Laud Misc. 734, ff. 1r-66r (fin XIIIe – XIVe s.) ; H = Glasgow, University Library, Hunter 253, ff. 1r-28r (fin XIIIe – XIVe s.) ; F = Paris, BibliothĂšque Nationale de France, Lat. 6514, ff. 144r-171v (fin XIIIe – XIVe s.) ; C = Bernkastel-Kues, Bibliothek im St. Nikolaus Hospital, 299, ff. 1r-49v (XIVe s.) ; V = St Gall, Stadtbibliothek (Kantonsbibliothek), Vadianus 300, ff. 1r-37r (XIVe s.) ; O = MontrĂ©al, McGill University, Osler Library, 480, ff. 1r-227r (XIVe s.) ; S = London, British Library, Sloane 1754, ff. 186v-193r (XIVe s.) ; D1 et D2 = Oxford, Bodleian Library, Digby 219, contenant deux versions, ff. 1r-27v et ff. 28r-74v (XVIe s.). À cette liste s’ajoutent quelques extraits. Au sujet de la tradition manuscrite du De anima, cf. Moureau, « Questions of Methodology about Pseudo-Avicenna’s De anima in arte alchemiae... », p. 5-12.

52 Il s’agit de la seule publication de Mino Celsi, qui ne s’intĂ©ressait pas outre mesure Ă  l’alchimie et a probablement publiĂ© le traitĂ© pour attirer l’attention du roi de France Charles IX, cf. Moureau, Le De anima in arte alchemiae..., vol. 1, partie 1, p. 203-204. Je remercie Didier Kahn pour son aide Ă  ce sujet. Pseudo- Avicenna, De anima in arte alchemiae, in Artis Chemicae Principes, Avicenna atque Geber, ed. Mino Celsi, Basel, Pietro Perna, 1572, 9 p. non numĂ©rotĂ©es + p. 1-471 (http://web2.bium.univ-paris5.fr/livanc/?cote=75697&do=livre). Les autres traitĂ©s du recueil sont : le De investigatione perfectionis Gebri (p. 473-497), la Summa perfectionis Gebri (p. 497-708), le De inventione veritatis Gebri (p. 709-735), et le Liber Fornacum Gebri (p. 736-767).

53 Cf. n. 15.

54 Les chapitres du De anima sont appelĂ©s dictio, traduction littĂ©rale de l’arabe maqāla, qui dĂ©signe une section d’un ouvrage. Le De anima est divisĂ© en dix dictiones (la Porta elementorum les prĂ©cĂšde et ne fait pas partie du compte), qui sont indĂ©pendantes de la division en trois parties dĂ©crite plus haut.

55 Suppression de la phrase : Non potest dici bonum magisterium absque bonis rationibus et bonus magister non potest esse nisi sciat omnes rationes.

56 Au sujet de cette liste de noms, cf. Moureau, Le De anima in arte alchemiae..., vol. 1, partie 1, p. 83-130.

57 Il est peu probable qu’il s’agisse de Virgile, qui n’est que trĂšs rarement citĂ© comme alchimiste ; on doit plutĂŽt conjecturer une dĂ©formation de transcription ou de lecture qui aura Ă©tĂ© corrigĂ©e par un copiste.

58 Pour un Ă©tat de la question dĂ©taillĂ©, sur lequel je me base, ainsi qu’une bibliographie plus complĂšte, cf. AndrĂ©e Colinet, Les alchimistes grecs. Tome X. L’anonyme de Zuretti ou l’art sacrĂ© et divin de la chrysopĂ©e par un anonyme, Ă©d. et trad., Paris, 2000, p. XLII-XLV ; Gabriele Ferrario, « Il Libro degli allumi e dei sali : status quaestionis e prospettive di studio », in Henoch, 26, 2004, p. 275-296.

59 Ce titre latin rappelle l’incipit arabe du texte conservé : al-qawl fÄ« al-anfus wa-al-arwāង al-ma‘diniyya, c’est-Ă -dire le discours sur les Ăąmes et les esprits minĂ©raux.

60 Sur ce manuscrit, cf. Gabriele Ferrario, « An Arabic Dictionary of Technical Alchemical Terms : MS Sprenger 1908 of the Staatsbibliothek zu Berlin (fols. 3r–6r) », in Ambix, 56, 2009, p. 36-48.

61 Julius Ruska, Das Buch der Alaune und Salze, eine Grundwerk der spÀtlateinischen Alchemie, Berlin, 1935.

62 Robert Steele, « Practical Chemistry in the Twelfth Century: Rasis de aluminibus et salibus », in Isis, 12, 1929, p. 10-46.

63 Les dénominations des versions P et G viennent de Ruska.

64 Compendium alchimiae. Ioannis Garlandii Angli philosophi doctissimi, cum Dictionario eiusdem artis ; atque de Metallorum tinctura praeparationeque eorundem Libello ; ante annos DXX. eodem authore conscripto. Adiecimus eiusdem compendii per Arnoldum de Villanova explicationem. Cum tractatu de Salium Aluminumque varietate, compositione et usu, Scriptoris incerti, Basel, Pietro Perna, 1560, 174 p., in 8°.

65 Cf. Ruska, « Das Buch der Alaune und Salze... ».

66 C’est l’édition en cours du manuscrit Digby 119 par Catherine Arbuthnott que j’utilise quand je cite la version G.

67 Ernst Darmstaedter, « Liber claritatis totius alkimicae artis », in Archivio di Storia della Scienza, 6, 1925, p. 319-330 ; 7, 1926, p. 257-265 ; 8, l927, p. 95-103, 214-229 ; et Archeion, 9, 1928, p. 63-80, 191-208, 462-482.

68 AppelĂ©e ainsi par A. Colinet dans sa thĂšse : AndrĂ©e Colinet, L’anonyme de Zuretti, Un traitĂ© alchimique grec du 14e siĂšcle, thĂšse de doctorat, Louvain-la-Neuve, UniversitĂ© catholique de Louvain, 1992, vol. I, p. 90-91.

69 Burnett, « The Coherence of the Arabic-Latin Translation Program... », p. 280 (n° 66 de la liste).

70 Qui a eu la gentillesse de me donner son travail en cours, ce dont je la remercie vivement.

71 Eduard Frunzeanu a observĂ© le mĂȘme phĂ©nomĂšne dans des citations bibliques ainsi que dans certaines citations de textes de philosophie naturelle.

72 Je n’ai pas pu identifier la famille de manuscrits utilisĂ©s par Vincent de Beauvais, car les rares variantes observĂ©es dans le Speculum naturale et le Speculum doctrinale ne sont gĂ©nĂ©ralement pas reprises dans l’apparat de la version P du De aluminibus et salibus.

73 Il omet la phrase : Posuit ergo Deus excelsus de sapiencia sua in hoc mundo sublimi minori, qui est compar mundo maiori (...). 

74 L’édition de Douai est elle-mĂȘme tributaire de l’édition de Strasbourg de 1476. Je remercie Eduard Frunzeanu de m’avoir indiquĂ© cette information.

75 L’édition de Venise de 1591 reprise par Sylvain Matton (cf. n. 4) propose inde dans le Speculum doctrinale et Graeci dans le Speculum naturale.

76 L’original arabe a Ă©tĂ© Ă©ditĂ© par Ahmed Atech, « Ibn SÄ«nā, Risālat al-iksÄ«r », in Turkiyat Mecmuasi, 1952, p. 27-54. Le texte latin (qui n’a pas encore Ă©tĂ© Ă©ditĂ© de façon critique et dont j’espĂšre produire l’édition critique) se trouve dans le Theatrum Chemicum, Strasbourg, Lazarus Zetzner et hĂ©ritiers, vol. 4, 1659, p. 863-875. Le texte latin, accompagnĂ© d’une traduction anglaise, est reproduit dans H. E. Stapleton, R. F. Azo, M. Hidāyat កusain, G. L. Lewis, « Two alchemical treatises attributed to Avicenna », in Ambix, 10, 1962, p. 41-82. Le texte arabe d’Atech et le texte latin du Theatrum Chemicum, accompagnĂ©s d’une traduction française, sont reproduits dans Anawati, « Avicenne et l’alchimie... », p. 302-339. Pour les manuscrits, cf. Georges C. Anawati, MillĂ©naire d’Avicenne : essai de bibliographie avicennienne, Le Caire, 1950, n° 153 (p. 221-222). Pour un Ă©tat de la question sur l’épĂźtre, cf. les articles mentionnĂ©s dans cette note, ainsi que Ruska, « Die Alchemie des Avicenna... », p. 13-51 ; Ahmed Atech, « Ibn SÄ«nā ve Elkimya », in Ankara Universitesi Ilahiyat Fakultesi Degrisi, IV. Saydan ayribasin, 1952, p. 47-62 ; et Moureau, Le De anima in arte alchemiae..., vol. 1, partie 1, p. 60-62.

77 En l’absence d’édition critique Ă  ce jour, il est impossible de dĂ©terminer la famille de manuscrits utilisĂ©e par Vincent de Beauvais.

78 L’Epistola ad Hasen regem de re tecta est Ă©crite entiĂšrement Ă  la premiĂšre personne du singulier.

79 Au sujet des MĂ©tĂ©orologiques d’Aristote et de leur tradition arabe et arabo-latine, cf. E. J. Holmyard, D. C. Mandeville, Avicennae de congelatione et conglutinatione lapidum being a section of the KitĂąb al-Shifñ’. The Latin and Arabic texts ed. with an English Transl. of the latter and with critical notes, Paris, 1927 ; Casimir PetraĂŻtis, The Arabic version of Aristotle’s Meteorology, Beyrouth, 1967 ; Hans Daiber, Ein Kompendium der aristotelischen Meteorologie in der Fassung des HÌŁunain ibn IshÌŁĂąq, Amsterdam, 1975 ; Carmela Baffioni, La tradizione araba del IV libro dei « Meteorologica » di Aristotele, Napoli, 1980, (Supplemento n. 23 agli Annali ; vol. 40, 1980, fasc. 2) ; C. Baffioni, Il IV libro dei «Meteorologica» di Aristotele, Napoli, 1981 ; Pieter L. Schoonheim, Aristotle’s Meteorology in the Arabico-Latin Tradition, Leiden, 2000 ; Burnett, « The Coherence of the Arabic-Latin Translation Program... », p. 260-262 ; et surtout, pour la traduction latine, les articles de J.-M. Mandosio qui tordent le cou Ă  quelques idĂ©es reçues, Jean-Marc Mandosio, Carla Di Martino, « La ‘MĂ©tĂ©orologie’ d’Avicenne (Kitāb al-Shifā’ V) et sa diffusion dans le monde latin », in Wissen ĂŒber Grenzen : arabisches Wissen und lateinisches Mittelalter, Andreas Speer et Lydia Wegener (Ă©d.), Berlin, 2006, p. 404-425, et Jean-Marc Mandosio, « Humanisme ou barbarie ? Formes de la latinitĂ© et mĂ©moire de l’AntiquitĂ© dans quelques traductions mĂ©diĂ©vales de textes philosophiques arabes », in Écritures latines de la mĂ©moire de l’AntiquitĂ© au XVIe siĂšcle, HĂ©lĂšne Casanova-Robin et Perrine Galand (dir.), Paris, 2010, p. 227-263 (ici p. 243-252).

80 EditĂ©e de façon critique aux cĂŽtĂ©s de la version arabe dans Schoonheim, Aristotle’s Meteorology in the Arabico-Latin Tradition... La version arabe a Ă©tĂ© Ă©ditĂ©e de façon critique plusieurs fois avant l’édition de Schoonheim (mais cette derniĂšre est la plus aboutie) : Aristote, De Coelo et Meteorologica, ‘Abd al-Raáž„mān BadawÄ« (Ă©d.), Le Caire, 1961 ; PetraĂŻtis, The Arabic version..., p. 9-131.

81 EditĂ© de façon critique dans Aristote, Meteorologica, Liber quartus, Translatio Henrici Aristippi, Elisa Rubino (Ă©d.), Turnhout, 2010, (Aristoteles Latinus X 1). GĂ©rard de CrĂ©mone avait commencĂ© Ă  traduire le livre IV, mais s’était arrĂȘtĂ© aprĂšs le premier chapitre (conservĂ© dans le seul manuscrit Paris, BnF, Lat. 6325) ; cf. Schoonheim, Aristotle’s Meteorology in the Arabico-Latin Tradition..., p. XXXIII-XXXIV, le texte se trouve p. 144-150.

82 Et non comme on le pensait jusque rĂ©cemment vers 1200, cf. à ce sujet Mandosio, « Humanisme ou barbarie ? Formes de la latinitĂ© et mĂ©moire de l’AntiquitĂ©... », p. 244-245.

83 Le texte arabe a Ă©tĂ© Ă©ditĂ© de façon critique accompagnĂ© d’une traduction anglaise dans Holmyard, Mandeville, Avicennae de congelatione et conglutinatione lapidum..., trad. p. 17-42, texte p. 70-86. Le mĂȘme ouvrage comporte une Ă©dition non critique du texte latin, dans laquelle les auteurs suivent un seul manuscrit et notent les autres en apparat, laissant dans le texte de nombreuses erreurs et obscuritĂ©s. Le texte arabe a Ă©tĂ© Ă©ditĂ©plusieurs fois (souvent un ou quelques manuscrits), cf. en particulier Avicenne, Al-Shifā’. Al-áčŹabī‘iyyāt. 5, Al-ma‘ādin wa al-āthār al-‘ulwiyya..., Ă©d. MontaáčŁar, Zāyed et Ismā‘īl. Une partie du texte arabe et latin avec traduction française se trouve dans Anawati, « Avicenne et l’alchimie... », p. 289-301. Une petite partie du texte latin est Ă©ditĂ©e dans Newman, The Summa Perfectionis of pseudo-Geber..., p. 48-51. Enfin, le texte latin a Ă©tĂ© Ă©ditĂ© de façon critique dans Roger French, « Teaching Meteorology in Thirteenth-Century Oxford : the Arabic Paraphrase », in Physis. Rivista internazionale di storia della scienza, 36, 1999, p. 99-129 (texte p. 121-129), mais cette Ă©dition est sĂ©vĂšrement critiquĂ©e par Jean-Marc Mandosio ; non vidi. Au sujet de la minĂ©ralogie d’Avicenne, cf. M. Y. Haschmi, « Die geologischen und mineralogischen Kenntnisse bei Ibn Sina », in Zeitschrift der Deutschen MorgenlĂ€ndischen Gesellschaft, 116, 1966, p. 44-59.

84 Cette hypothĂšse convaincante est celle dĂ©fendue par Jean-Marc Mandosio dans « Humanisme ou barbarie ? Formes de la latinitĂ© et mĂ©moire de l’AntiquitĂ©... », p. 243-252.

85 À ce sujet et au sujet de cette traduction d’Alfred de Sareshill, cf. Mandosio, Di Martino, « La ‘MĂ©tĂ©orologie’ d’Avicenne (Kitāb al-Shifā’ V)... », p. 404-425, et Mandosio, « Humanisme ou barbarie ? Formes de la latinitĂ© et mĂ©moire de l’AntiquitĂ©... », p. 243-252. Au sujet de la dĂ©signation erronĂ©e de De congelatione et conglutinatione lapidum, qui est en rĂ©alitĂ© le titre de la premiĂšre section du De mineralibus, cf. Mandosio, Di Martino, « La ‘MĂ©tĂ©orologie’ d’Avicenne (Kitāb al-Shifā’ V)... », p. 411 n. 28.

86 À l’exception de certains auteurs, comme Roger Bacon, Albert le Grand, etc. cf. Steven J. Williams, « Defining the Corpus Aristotelicum : Scholastic Awareness of Aristotelian Spuria in the High Middle Ages », in Journal of the Warburg and Courtauld Institutes, 58, 1995, p. 29-51.

87 Elle n’est conservĂ©e que dans un seul manuscrit, le ms. Vatican, BAV, Urbin. Lat. 186, ff. 140v-173v. Au sujet de cette traduction, cf. Charles Burnett, « Arabic into Latin: the reception of Arabic philosophy into Western Europe », in Cambridge Companion to Arabic Philosophy, Peter Adamson et Richard Taylor (dir.), Cambridge, 2004, p. 370-404 (ici p. 381-382 et 395) ; Mandosio, Di Martino, « La ‘MĂ©tĂ©orologie’ d’Avicenne (Kitāb al-Shifā’ V)... », p. 409-410 ; Mandosio, « Humanisme ou barbarie ? Formes de la latinitĂ© et mĂ©moire de l’AntiquitĂ©... », p. 253-261.

88 Je n’analyse pas la citation Bif., 5, 63c (chapitre De montibus ac ceteris locis patentibus = SN, 6, 20-24).

89 Cependant, la citation SN, 5, 80d n’est pas prise en compte dans les calculs dans l’article, car elle se situe dans un autre contexte qu’un discours sur l’alchimie et porte spĂ©cifiquement sur la formation des pierres. Je tiens compte de la version plus longue de cette citation en Bif., 5, 96a2 (= SN, 7, 80a – SD, 11, 123b).

90 Je n’ai pas pu identifier la famille de manuscrits utilisĂ©e dans le Speculum naturale en raison de l’écart que Vincent de Beauvais prend par rapport au texte d’Aristote. Concernant le livre III, les extraits Ă©tudiĂ©s sont trop peu nombreux pour ĂȘtre significatifs. Concernant les manuscrits du De mineralibus, cf. la suite de l’article.

91 Pour les raisons de l’inadĂ©quation entre les citations sĂ©parĂ©es et leur somme.

92 Albert le Grand, De mineralibus, A. Borgnet (éd.) (Opera Omnia, Vol. V : De mineralibus, De anima, Philosophia pauperum, Liber de Apprehensione, Paris, 1890), III, tr. 1, c. 9, p. 70 : Ex omnibus autem his inductis possumus considerare, utrum verum sit quod quidam Aristotelem dicunt dixisse, cum secundum rei veritatem dictum sit Avicennae, quod videlicet sciant artifices alchimiae species permutari non posse, sed similia his facere possunt.

93 SN, 7, 85a : (...) Nonnulli etiam illud ultimum capitulum Meteororum, ubi agitur de transmutatione metallorum, dicunt non esse Aristotelis, sed additum ex verbis cuiusdam alterius auctoris {actoris dans les mss. Paris, BnF, Lat. 14387, et Cambridge, Corpus Christi College, 39, f. 132 vb ; l’édition de Venise de 1591 note auctoris}.

94 Le mĂȘme phĂ©nomĂšne s’observe dans l’édition de Venise de 1591 reprise par Sylvain Matton (cf. n. 4) : le texte est absent du Speculum doctrinale et prĂ©sent dans le Speculum naturale.

95 L’hypothĂšse prĂ©sentĂ©e ici est la conclusion des Ă©changes que j’ai eus avec Isabelle Draelants et Eduard Frunzeanu.

96 Cf. n. 23.

97 Holmyard, Mandeville, Avicennae de congelatione et conglutinatione lapidum..., p. 45-55.

98 Aristotelis, philosophorum maximi, secretum secretorum ad Alexandrum ; de Regum regimine ; de Sanitatis conservatione ; de Physionomia. Ejusdem de Mineralibus. Alexandri Aphrodisei, clarissimi peripatetici, de Intellectu. Averrois magni commentatoris, de Anime beatitudine. Alexandri Achillini Bononiensis, de Universalibus, Alexandri Macedonis, in septentrione monarche, de Mirabilibus Indiae, ad Aristotelem (...), Et impressus Bononiae, impensis Benedicti Hectoris, anno Domini 1501... 26 octobris, illustrissimo Joanne secundo Bentivolo rei publicae Bononiensis habenas foeliciter moderante, Bologna, 1501.

99 Au sujet du Sciant artifices, cf. Newman, The Summa Perfectionis of pseudo-Geber..., p. 1-56 ; Barbara Obrist, « Les rapports d’analogie entre philosophie et alchimie mĂ©diĂ©vales », in Alchimie et philosophie Ă  la Renaissance. Actes du colloque international de Tours, 1991, Jean-Claude Margolin et Sylvain Matton (dir.), Paris, 1993, p. 43-64 ; Obrist, « Art et nature... », p. 215-286 ; William R. Newman, Promethean Ambitions. Alchemy and the Quest to Perfect Nature, Chicago, London, 2004, p. 37-44 et passim.

100 Holmyard, Mandeville, Avicennae de congelatione et conglutinatione lapidum..., p. 47.

101 Je remercie Eduard Frunzeanu de m’avoir indiquĂ© que Vincent de Beauvais citait le Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham.

102 Cf. Bruno Roy, « La trente-sixiĂšme main : Vincent de Beauvais et Thomas de Cantimpré », in Vincent de Beauvais : Intentions et rĂ©ceptions d’une Ɠuvre encyclopĂ©dique au Moyen Âge. Actes du XIVe Colloque de l’Institut d'Ă©tudes mĂ©diĂ©vales, organisĂ© conjointement par l’Atelier Vincent de Beauvais (UniversitĂ© de Nancy II) et l’Institut d’études mĂ©diĂ©vales (UniversitĂ© de MontrĂ©al), 27-30 avril 1988, Serge Lusignan, Monique Paulmier-Foucart et Alain Nadeau (dir.), Saint-Laurent (QuĂ©bec), 1990, p. 241-251 ; Eduard Frunzeanu, Les configurations de la natura dans le Speculum maius de Vincent de Beauvais, thĂšse de doctorat, MontrĂ©al, UniversitĂ© de MontrĂ©al, 2007, p. 39-40 ; et concernant la tradition manuscrite, cf. Baudouin Van den Abeele, « Diffusion et avatars d’une encyclopĂ©die : le Liber de natura rerum de Thomas de Cantimpré », in Une lumiĂšre venue d’ailleurs. HĂ©ritages et ouvertures dans les encyclopĂ©dies d’Orient et d’Occident au Moyen Âge, Actes du colloque de Louvain-la-Neuve, 19-21 mai 2005, Godefroid de CallataĂż et Baudouin Van den Abeele (dir.), Louvain-la-Neuve, 2008, (RĂ©minisciences, 9), p. 141-176.

103 Les versions Thomas I et II ont Ă©tĂ© Ă©ditĂ©es par Boese (Thomas de CantimprĂ©, Liber de natura rerum, editio princeps secundum codices manuscriptos, t. 1 : text, Ă©d. par H. Boese, Berlin, 1973), Thomas III a Ă©tĂ© Ă©ditĂ© provisoirement en 1992 par B. K. Vollmann et C. HĂŒnemörder, dans le cadre du Projektgruppe B2 du SFB 226 WĂŒrzburg-EichstĂ€tt. Les auteurs ont transmis Ă  Isabelle Draelants leur Ă©dition diffusĂ©e de maniĂšre dactylographiĂ©e ; celle-ci est en cours d’intĂ©gration dans le corpus Sourcencyme. Au sujet de la version Thomas IV, cf. la trĂšs rĂ©cente Ă©tude de Max Schmitz, Le Viridarium du juriste avignonnais Jean Raynaud : une encyclopĂ©die latine du Moyen Age tardif, thĂšse de doctorat, Louvain-la-Neuve, UniversitĂ© catholique de Louvain, CEMR, 2012, qui contient un long chapitre « Thomas IV » (p. 94-180) qui apporte de nombreuses innovations sur le sujet. Les versions peuvent elles-mĂȘmes ĂȘtre divisĂ©es en diverses Ă©tapes successives, Thomas I [a] et Thomas I [b], et Thomas II [a] et Thomas II [b], et Thomas III [a], [b], [b1] et [b2], cf. Frunzeanu, Les configurations de la natura dans le Speculum maius..., p. 39-40 ; et Thomas IV [a], [b1] et [b2], cf. la thĂšse de M. Schmitz susmentionnĂ©e.

104 Cf. Dmitri Abramov, Die moralisierende EnzyklopĂ€die Liber de naturis rerum von Pseudo-John Folsham, in Die EnzyklopĂ€die im Wandel vom Hochmittelalter bis zur frĂŒhen Neuzeit. Akten des Kolloquiums des Projekts D im Sonderforschungsbereich 231(29.11.-1.12.1996), Ch. Meier (Ă©d.), MĂŒnchen, 2002 (MĂŒnstersche Mittelalter-Schriften, 78), p. 123-154 et Abramov, ‘Liber de naturis rerum’ von Pseudo-John Folsham - Eine moralisierende lateinische EnzyklopĂ€die aus dem 13. Jahrhundert, thĂšse de doctorat, Hambourg, UniversitĂ€t Hamburg, 2003, p. I-LXII, en particulier p. XXXV-XLI. Disponible sur le site http://ediss.sub.uni-hamburg.de/volltexte/2011/5030/.

105 Actor. De natura et motu terre et eius zonis ac regionibus variis; de lapidibus quoque communibus et gemmis, ac mineris et glebis, que in superficie terre iacent, vel intra eius viscera continentur, multa quidem in historia naturali superius a nobis descripta sunt, pauca tamen adhuc et de his; et de ceteris rerum naturis, etiam hoc in loco adiicere placuit, que ex libello quodam edito nuper a magistro Iacobo de Vitriaco et ex quibusdam aliis auctoribus, a quodam e nostris collecta, postmodum ad manus nostras devenerunt.

106 Elles sont intĂ©gralement notĂ©es dans l’annexe. Concernant le livre IV des MĂ©tĂ©orologiques, identifiĂ© par Abramov, certaines identifications sont prĂ©cisĂ©es, car quelques passages lui ont Ă©chappĂ©.

107 Liber de natura rerum de Thomas de Cantimpré : SD, 15, 58a1 ; SN, 7, 7b1 – SD, 15, 58a2 ; SD, 15, 58a3 ; SN, 7, 36c – SD, 15, 60b2 ; SN, 7, 37e ; SN, 7, 40c – SD, 15, 62a ; SN, 7, 51b – SD, 15, 63a.

108 Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham : SN, 6, 79c ; SN, 6, 82a ; SN, 6, 83a ; SN, 7, 7b2 ; SN, 7, 7b3 ; SN, 7, 18d ; SN, 7, 24a – SD, 15, 60a ; SN, 7, 26c ; SN, 7, 38d ; SN, 7, 52a ; SN, 7, 61f.

109 Cf. Frunzeanu, Les configurations de la natura dans le Speculum maius..., p. 40-41. Vincent de Beauvais n’utilise pas Thomas III (certains passages du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham se retrouvent dans la version Thomas III).

110 Les informations reprises dans ce rĂ©sumĂ© sont tirĂ©es de StanisƂaw Wielgus, « Quaestiones Nicolai Peripatetici », in Mediaevalia Philosophica Polonorum, 17, 1973, p. 57-155 (ici p. 57-63). Le texte des Quaestiones Nicolai Peripatetici est Ă©ditĂ© de façon critique aux p. 79-146. Cf. également Marie-ThĂ©rĂšse d’Alverny, « La tradition manuscrite des ‘Questiones Nicolai Peripatetici’ », in Medieval Learning and Literature : Essays presented to R. W. Hunt, Jonathan James Graham Alexander et Margaret T. Gibson (dir.), Oxford, 1976, p. 200-219.

111 Sur les citations des Quaestiones Nicolai Peripatetici chez Albert le Grand, cf. Robert Halleux, « Albert le Grand et l’alchimie », in Revue des sciences philosophiques et thĂ©ologiques, 66, 1982, p. 57-80.

112 La liste détaillée, ainsi que la proposition de stemma codicum, se trouve dans Wielgus, « Quaestiones Nicolai Peripatetici... », p. 63-79.

113 Wielgus, « Quaestiones Nicolai Peripatetici... », p. 60.

114 Le relevé de la plupart des citations des Quaestiones Nicolai Peripatetici (et non seulement des citations alchimiques) dans le Speculum naturale se trouve dans Wielgus, « Quaestiones Nicolai Peripatetici... », p. 76 ; il est à compléter par les identifications posées sur le corpus Sourcencyme.

115 Cf. n. 15.

116 Au sujet de cette Ɠuvre, cf. Burnett, Jacquart (dir.), Constantine the African and Ê»AlÄ« Ibn Al-Ê»Abbās Al-MaÄŸĆ«sÄ«..., passim. J’ai utilisĂ© l’édition de Lyon de 1523 (cf. annexe).

117 Le marqueur est Hali ubi supra, c’est-à-dire regalis practica, sermone II.

118 La situation est donc assez complexe :

L’édition de Douai propose :

  • SD, 11, 60a1 et a2 : marqueur Liber de natura/is rerum : Es autem sive cuprum eiusdem est duritiei cum argento et eiusdem liquationis...

  • SD, 11, 60b1 et b2 : Philosophus : Es sive cuprum sonorum est et vocale natura calidum...

Le manuscrit Paris, BnF, Lat. 16100 :

  • SD, 12 (changement des numĂ©ros de livres), 60 a1 et a2 : marqueur Liber de natura/is rerum : omission du texte ;

  • SD, 12, 60b1 et b2 : omission du marqueur : Es sive cuprum sonorum est et vocale natura calidum...

119 Le texte repris par Sylvain Matton, de l’édition de Venise en 1591 (citĂ© n. 4) ne comprend que les chapitres nommĂ©ment consacrĂ©s Ă  l’alchimie, c’est-Ă -dire les chapitres 105-133 du livre XI ; je n’ai donc pas pu vĂ©rifier la citation dont il est question ici.

120 Cf. Frunzeanu, Les configurations de la natura dans le Speculum maius..., p. 39-42.

121 Ces citations sont les sources internes du Liber de naturis rerum du pseudo-John Folsham, qu’il n’avait pas encore identifiĂ© dans sa thĂšse, mais qu’il m’a indiquĂ© lors de la rĂ©vision de cet article.

122 Cf. Monique Paulmier-Foucart, « Les passages Actor dans le Speculum maius : essai de typologie », in L’entreprise encyclopĂ©dique, Jean Bouffartigue et Françoise MĂ©lonio (dir.), Nanterre, Centre des sciences de la littérature, Université Paris X, 1997, (LittĂ©rales, 21), p. 207-219 ; et surtout Frunzeanu Les configurations de la natura dans le Speculum maius..., p. 47-58.

123 Mandosio, « La place de l’alchimie  », p. 204-205.

124 L’extrait du De anima est le SN, 7, 60a – SD, 11, 117a, celui de la Doctrina alchimiae SN, 7, 60b1 – SD, 11, 105d1, et celui de la version P De aluminibus et salibus SN, 5, 86a – SD, 11, 118a1.

125 Je note ici le texte du Liber exceptionum de Richard de Saint-Victor, I, 1, 23 (Ă©dition de Jean ChĂątillon, Paris, 1958, p. 111), tel que je le trouve citĂ© dans Mandosio, « La place de l’alchimie... », p. 205, n. 26 : Sciendum quoque est quod mechanica secundum rationem sui sub philosophis continetur, non secundum administrationem. Verbi gratia : ratio agricultuae pertinet ad philosophum, administratio ad rusticum. Le texte de l’édition de Douai est corrompu, le sens est modifiĂ© (SD, 11, 1a, marquĂ©e Richardus (de Sancto Victore) ubi supra <liber exceptionum>) : Sciendum quoque est, quod mechanica secundum rationem sui, sub philosophia continetur secundum administrationem. Verbi gratia, ratio agriculture pertinet ad philosophum, administratio ad rusticum. Mechanica VII habet species, scilicet lanificium, armaturam, navigationem, agriculturam, venationem, medicinam, theatricam. Ad hanc omnium rerum fabrica concurrere videtur: ad hanc enim pertinent universa que humanis necessitatibus inveniuntur grata, commoda, necessaria; et quecumque sub predictis eius speciebus comprehendi comprobantur. Comparer avec SD, 11, 105a.

126 Au sujet des principes d’élixir et de ferment, cf. Moureau, « Elixir atque fermentum... ».

 

Pour citer l'article: 

S. Moureau, « Les sources alchimiques de Vincent de Beauvais », in SpicĂŠ, Cahiers de l’Atelier Vincent de Beauvais, nouvelle sĂ©rie, 2, 2012, p. 5-118 <consultĂ© en ligne le (date) Ă  l’adresse : spicae-cahiers.univ-lorraine.fr/node/48>